2016
Cairn
Fabrice Moulin, « Citadelle assiégée, citadelle assaillie. Architectures et écritures de la retraite dans le roman sadien », Dix-huitième siècle, ID : 10670/1.rvhma5
Si, parmi tous les espaces sadiens, la retraite étanche et carcérale (du château de Silling à l’île de Minski) sert bien souvent de paradigme pour appréhender la radicalité de l’œuvre clandestine, il existe aussi, dans l’œuvre avouée de Sade ( Aline et Valcour, les Crimes de l’amour, La Marquise de Gange) une version plus ambiguë du retrait fortifié (le fragile refuge de Vertfeuille, le repaire découvert de Franlo ou encore le vénéré et inquiétant château de Gange). Signe de la subtilité de l’écriture exotérique, ici, tous les glissements sont possibles (du vice à la vertu, de l’ amoenus au terribilis). Ne pourrait-on pas lire ces deux grandes configurations du retrait (la forteresse impénétrable/le réduit « poreux ») comme les traductions spatiales de deux modes d’écriture, c’est-à-dire de deux rapports radicalement différents de Sade à son lecteur et aux sources de la tradition romanesque (notamment le roman noir) ? Il s’agit d’appréhender encore une fois la frontière entre l’œuvre exotérique et l’œuvre ésotérique de Sade, en passant cette fois-ci non pas par la nature des intrigues ni par la charpente des personnages, mais par la configuration des espaces.