17 décembre 2022
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Julien Decker, « La normalisation du Cynisme dans ses usages philosophiques antiques », HALSHS : archive ouverte en Sciences de l’Homme et de la Société, ID : 10670/1.t4cgfm
Ce travail part du présupposé qu’il est impossible de déterminer, à partir des témoignages antiques, ce qu’était le Cynisme historique. Il n’y a que des usages du Cynisme, c’est-à-dire que chaque texte doit être référé autant que possible à son auteur et à ses stratégies d’écriture. Le Cynisme fait d’ailleurs l’objet de propos très contrastés : le même aspect peut être loué pour sa vertu ou condamné sévèrement pour ses outrances. De plus, ce sont surtout des anecdotes qui ont été rapportées et non des dogmes. Dès lors, les usages qui sont faits des Cyniques situent nécessairement leurs provocations et leur exigence de vertu dans un ensemble de normes. C’est en cela qu’il y a une double normalisation : non seulement les anecdotes et les scandales doivent être pensés vis-à-vis de normes existantes, mais aussi les outrances sont normalisées par les auteurs et donc atténuées.En s’intéressant aux usages philosophiques, ce travail repère trois points importants. Le premier consiste à déterminer si le Cynisme est un mode de vie ou une école philosophique ; or, cet enjeu oblige également à définir ce qu’est la philosophie et à comprendre, à partir des anecdotes, la question de l’exemplarité. La construction du livre 6 de Diogène Laërce est majoritairement étudiée dans cette partie. Le deuxième point s’intéresse plus précisément à l’opposition entre la nature et la loi : la réputation d’un Cynisme transgressif se confronte à la rareté des textes exprimant une désobéissance au nomos. Au contraire, c’est le respect du nomos qui est finement construit dans les interprétations d’Épictète et de l’empereur Julien. Enfin, la dernière partie s’intéresse à un trait qui se prête mal à la normalisation : l’impudence. Les interprétations de Sénèque et d’Épictète illustrent la difficulté à articuler à la vertu la transgression des règles coutumières de la pudeur. Pour autant, elles montrent que dans l’impudence cynique, il y a quelque chose qui résiste à la normalisation et qui fait l’identité du mouvement.