2006
Cairn
Daniela Heimerl, « Serbie-et-Monténégro 2005-2006 : La dernière année de l'Etat commun », Le Courrier des pays de l'Est, ID : 10670/1.v0h6qq
La Serbie-et-Monténégro a reçu en 2005 les éloges de la Banque mondiale pour ses progrès en matière de mise en place des réformes économiques, alors qu’en même temps une forte hausse des investissements directs étrangers et des réserves importantes en devises étrangères réduisaient sa dépendance à l’égard de l’aide extérieure. En revanche, l’éclatement de la Yougoslavie allait jouer les prolongations : le Monténégro, entité incluse dans une construction étatique, née en février 2003 de la volonté européenne, est devenue indépendante par référendum le 21 mai 2006. Côté Serbie, ce choix fit l’effet d’un véritable choc pour le gouvernement minoritaire et le Premier ministre, Vojislav Kostunica. Pourtant, la Serbie devenait ainsi en quelque sorte indépendante elle aussi, ouvrant la voie, aux dires de certains Serbes, à une réflexion sur une autre structure étatique et territoriale du pays. Jusque-là, V. Kostunica a en effet conduit la Serbie dans une impasse, aussi bien en politique intérieure qu’extérieure. La coalition hétérogène, dirigée par le Parti démocratique (DSS), dont le Premier ministre est le leader, ne se maintient au pouvoir que grâce aux prébendes, avantages et privilèges généreusement distribués et dont profitent avant tout les membres du Parti socialiste, mais aussi d’autres petites formations. Le Premier ministre est ainsi dans l’incapacité de rompre les tabous : sa promesse de faire arrêter l’ancien général Ratko Mladic, inculpé par le TPIY, n’a toujours pas été tenue, amenant l’UE à interrompre les négociations sur l’Accord de stabilisation et d’association, les pourparlers ne pouvant reprendre rapidement qu’une fois acquise la pleine coopération des autorités. Quant au statut final du Kosovo, «province» longtemps intouchable pour la Serbie, il devrait faire l’objet de négociations, dont le Secrétaire général de l’Onu, Kofi Annan, a annoncé, en octobre 2005, qu’il «recommandait» l’ouverture, et ce malgré un rapport critique sur l’état de droit. De février à juin 2006, pas moins de six rencontres ont eu lieu à Vienne, entre les représentants de Belgrade et des Kosovars, sous les auspices des Nations unies, qui n’ont fait que montrer l’énorme fossé existant entre leurs prétentions quant au devenir de ce territoire.