12 juin 2016
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Pierre LANNOY, « La hantise du précédent en photographie. Généalogies médiumniques et formes de revenances dans la photographie industrielle », Conserveries mémorielles, ID : 10670/1.xs1wqx
Le travail photographique, lorsqu’il est mené dans une perspective artistique, suppose la construction et la tenue d’un regard personnel, attaché à l’individualité de son auteur. Mais lorsque ce regard se pose sur des lieux déjà photographiés par des pairs, leur présence les hante et influence leur saisie. Le photographe en quête d’originalité picturale est habité par la hantise du revenant, ce fantôme qui se dresse entre lui et l’objet visé : le photographe qui l’a précédé, pourtant absent, s’immisce dans son travail présent. Il s’agit ici de montrer que l’artiste-photographe est affecté par la hantise du précédent, au double sens de style déjà incarné et d’œuvre déjà existante. La tension qui l’anime consiste à concilier le signalement et la mise à distance de ce précédent dans ses propres clichés, afin de définir sa place dans la généalogie du genre : imitateur, héritier, innovateur, révolutionnaire – autant de figures possibles qui se construisent dans la mise en scène, au sein même du médium que sont les images produites, du rapport aux prédécesseurs, morts ou vivants, mais absents des lieux. En étudiant de manière détaillée des séries consacrées aux usines automobiles par de grands photographes (Doisneau, Charbonnier, Wolff, Tritschler, Keetman, Sheeler, Evans ou Frank), le texte s’attache à dégager la logique situationnelle de la hantise en photographie, les états d’esprit qu’elle convoque ainsi que les formes de référence aux figures antérieures sur lesquelles elle repose. Une réflexion sur les enjeux épistémologiques d’une telle démarche est également proposée en fin de parcours.