2013
Cairn
Jean-Baptiste Pingault et al., « Le rôle de la mère dans la régulation des conflits entre enfants : une étude observationnelle », Devenir, ID : 10670/1.ynerrl
Les comportements agonistiques (menaces et agressions) d’un enfant envers ses pairs dépendent en partie de ses interactions avec ses propres parents. Les modèles théoriques à disposition présupposent souvent que le parent joue un rôle moteur : l’enfant reproduit ou redirige vers ses pairs les comportements du parent à son égard. Cependant, pour vérifier ces théories, il convient de procéder à une analyse séquentielle des interactions avec les parents et avec les pairs. Une telle analyse est difficile car il est rare d’observer, dans un même espace-temps, un enfant, ses parents et d’autres enfants. Les observations de cette étude se sont déroulées dans un accueil parents-enfants qui a cette particularité de regrouper plusieurs types de partenaires dans un même espace-temps. L’accueil parents-enfants étudié se situe au bas d’une colline favelisée de l’Etat de Rio de Janeiro et 22 enfants de un à quatre ans ont été observés plus d’une heure pour un total de 104 heures d’observations. Les comportements de contrôle et agonistiques de la mère envers l’enfant sont corrélés aux comportements agonistiques de l’enfant envers ses partenaires (respectivement τ = + 0,27, p < 0,05 et + = τ 0,22, p = 0,08). L’analyse séquentielle montre des logiques comportementales claires dans l’usage de la saisie (prendre l’objet d’un partenaire), de la menace et de l’agression. De plus, la mère intervient en miroir dans les interactions de l’enfant avec ses autres partenaires : elle effectue un contrôle ou une saisie lorsque l’enfant prend l’objet d’un partenaire et un contrôle ou un comportement agonistique lorsque l’enfant effectue un comportement agonistique envers le partenaire. L’analyse séquentielle tend donc à montrer que l’enfant n’imite pas les comportements agonistiques de la mère mais que la mère s’adapte au comportement de son enfant pour réguler ses interactions avec les pairs. Par ailleurs, la fréquence des agressions envers les pairs diminue avec l’âge chez les enfants de un à quatre ans (τ = - 0,36, p < 0,05), et notamment les agressions qui apparaissent déconnectées d’un contexte conflictuel immédiat (par exemple, une saisie préalable d’un pair). Nous discutons les conséquences théoriques ainsi que les conséquences en termes de prévention de cette recherche.