2021
Cairn
Francesco Toto, « Le peuple contre l’État ? Les deux logiques du Contrat social », Les Études philosophiques, ID : 10670/1.yzev44
Cet article s’intéresse au Contrat social de Rousseau afin d’examiner si cet ouvrage permet de penser une révolte populaire contre l’État et, si oui, à quelles conditions. Dans cette perspective, nous nous concentrons principalement sur quelques détails apparemment marginaux : l’oscillation, par exemple, entre une conception de la « crise » comme occasion de régénération ou de renaissance de l’État ; l’hésitation entre une conception des mœurs et des coutumes comme formant le cœur de la législation et qui garantit la survivance du corps en deçà de la condition de mort apparente engendrée par les conflits, et une conception dans laquelle ces mœurs et ces coutumes s’avèrent constituer le résultat du conflit lui-même ; l’indécision entre une définition de la légitimité politique comme entièrement réabsorbée par la simple légalité et une autre où cette légitimité déborde toutes les formes et les limitations légales. De cette façon, l’article met en évidence la présence, dans le Contrat lui-même, de deux logiques opposées. D’une part, une logique d’après laquelle toute séparation entre le peuple et l’État disparaît. Dans cette perspective, tout contraste entre les deux pôles est inconcevable, et ce qui à première vue semble être une révolte du peuple contre l’État doit être lu comme une intervention du souverain visant à rétablir l’ordre légitime violé. D’autre part, une logique qui admet au contraire une relative autonomie du peuple par rapport aux institutions établies, et qui par là même permet de penser un conflit entre les deux pôles.