mai 2020
Roberta Bevilacqua et al., « Occitanie, Tarn, Brens. Roudoulou », HALSHS : archive ouverte en Sciences de l’Homme et de la Société, ID : 10670/1.zx801k
Un projet de construction d’une zone résidentielle et commerciale sur une surface d’environ 41 916 m² a motivé un diagnostic archéologique dans la commune de Brens.La parcelle diagnostiquée s’inscrit au sein des formations alluviales de la basse plaine du Tarn, dont le toit graveleux affleure dans la partie occidentale du terrain, à une altitude relative d’environ +35 m au-dessus de l’étiage actuel du fleuve. Son arasement progressif a sans doute détruit les vestiges anciens qui ont pu le surmonter. Deux nucléus sur galet de facture paléolithique ont été récoltés sur le versant méridional de ce paléo-relief.Des sables fins et limons d’épaisseur variable (moins d’1,50 m en général) surmontent les dépôts graveleux. L’évolution pédologique de ces dépôts superficiels fins conduit à la formation de sols bruns modaux (luvisols),qui ont été exploités au moins à partir du second âge du Fer. Quelques fossés et un drain de la fin du IIe – début du Ier s. av. notre ère traversent en effet les secteurs méridional et central de l’emprise, entourés de quelques structures de maintien et d’une fosse. Ces vestiges sont mal conservés et contiennent un mobilier modeste. Cependant, ils permettent d’étoffer le maillage des sites connus pour la période, démontrant ainsi l’occupation diffuse du territoire entre Montans et Gaillac à la période gauloise.Dans la partie septentrionale de l’emprise, se trouvent des sédiments graveleux déposés par le ruisseau de Fontbareillères. Dans ce secteur nous avons décelé un four et des structures excavées médiévales qui qui semblent composer un atelier de potier. La partie enterrée du four est constituée d’une chambre de chauffe / de cuisson à languette centrale réservée et d’une fosse d’accès. Le dispositif de la languette est présent autant dans les fours « classiques » à sole perforée (héritage de l’Antiquité) que dans les types à support de charge et « proto-longitudinaux », qui représentent des étapes successives dans l’évolution morphologiques des fours (Thuillier 2015). Tous ces types sont attestés en France du haut Moyen âge jusqu’au moins aux XIe - XIIe siècle. Aux alentours du four nous avons mis au jour cinq structures de maintien, deux fosses (dont une grande cuvette) et un fossé. L’absence d’un référentiel typologique étendu pour la céramique médiévale du Nord du Tarn complique la caractérisation typo-chronologique de l’atelier de Roudoulou. La céramique, notamment celle issue du four, possède en effet des aspects contrastés. La nature des pâtes, la présence de céramique grise polie, certaines formes et les larges diamètres plaident pour une chronologie reconnue pour le XIIIe siècle dans le Vaurais. Les décors de molettes soignées de plusieurs vases peuvent rappeler des types de motifs anciens attribués au haut Moyen Âge. Toutefois, les molettes imprimées attestées en Occitanie, et à Brens même, pour cette période ne livrent jamais ce genre de motifs (Cathma 1993, Catalo 2008, Tranier 2017). Dans l’hypothèse que l’atelier de potier ait fonctionné pendant une période limitée, cette typologie céramique et une datation radiocarbone du comblement de la grande cuvette pourraient converger pour dater son activité autour de la deuxième moitié du XIIe siècle. A contrario, si l’occupation médiévale a perduré et le mobilier s’avère diachronique, la chronologie du site pourrait couvrir tout le Moyen âge central (XIe-XIIIe siècles), voire inclure une partie du haut Moyen âge.Une incision linéaire de dimensions importantes longe les structures médiévales du côté méridional et se dirige vers le nord-ouest. Nous avons renoncé à créer une coupe transversale qui aurait nécessité l’aménagement de paliers de sécurité et l’ouverture d’un vaste sondage. Ainsi, en l’absence d’un profil, nous manquons de renseignements précis sur sa nature. Néanmoins, les observations d’ordre géomorphologique (tracé rectiligne partiellement colmaté, possibles connexions en amont et en aval au ruisseau de Fontbareillères et au Tarn) font penser qu’elle pourrait être d’origine anthropique. Interposée entre le ruisseau voisin et un lieu-dit en rive gauche du Tarn noté Croux del mouli sur le cadastre napoléonien, il pourrait notamment s’agir d’un bief destiné à créer une chute pour les besoins d’un (ou plusieurs) moulin(s). Le fait qu’il ne soit pas recensé sur le cadastre de 1828 porte à envisager qu’il soit plus ancien. Ainsi, il pourrait remonter à la période moderne ou médiévale.D’autres vestiges épars (des tronçons de fossés, quelques fosses et des trous de poteau isolés) sont modernes à contemporains ou bien restent non datés.