La météorite de L’Aigle (1803) : un étrange météore élucidé

Fiche du document

Date

2024

Discipline
Type de document
Périmètre
Langue
Identifiant
  • 20.500.13089/11pc2
Relations

Ce document est lié à :
info:eu-repo/semantics/reference/issn/2264-2617

Ce document est lié à :
https://hdl.handle.net/20.500.13089/11pc5

Ce document est lié à :
https://doi.org/10.4000/11pc5

Organisation

OpenEdition

Licences

info:eu-repo/semantics/openAccess , https://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/



Sujets proches Fr

Orne Orne Réel objets petit objet

Citer ce document

Anouchka Vasak, « La météorite de L’Aigle (1803) : un étrange météore élucidé », Revue de géographie historique


Partage / Export

Résumé Fr En

Le rapport de Jean-Baptiste Biot, alors plus jeune membre de l’Académie des sciences, Relation d’un voyage fait dans le département de l’Orne, Pour constater la réalité d’un météore observé à L’Aigle le 6 floréal an 11, est un modèle en matière de démarche scientifique. A partir d’une véritable enquête de terrain, au terme d’un voyage de dix jours sur les lieux (7-16 messidor, 26 juin-5 juillet), dont l’objet est l’étrange « météore » tombé d’un « petit nuage noir » dans un ciel serein un beau jour de printemps (26 avril 1803), Biot démontre la nature extraterrestre des météorites. Les habitants de ce territoire de l’Orne précisément circonscrit et cartographié se sont presque tous présentés comme « témoins oculaires […] d’une épouvantable pluie de pierres […] lancée par le météore ». Le mot « météore », employé dans le rapport, jette en ce sens ses derniers feux : c’est que le phénomène de Laigle n’est pas un météore, mais une météorite. Quelques années plus tard, le mot « météorite » se singularisera dans le sens actuel de « pierre extraterrestre trouvée à la surface terrestre ». Les témoignages visuels et sonores des habitants, paysans pour la plupart, font alors état d’un « météore » parti d’un petit nuage noir crépitant. Domine la croyance en un phénomène météorologique exceptionnel et effrayant. Jusque là, les « pluies de pierres » relevaient de la catégorie des « météores prodigieux », au même titre que les pluies de crapauds ou de sang. Si l’Encyclopédie de Diderot, à l’article « Météore », prend ses distances avec le discours du merveilleux en supposant une cause naturelle à certains de ces phénomènes, il faudra attendre le rapport de Biot pour que soit formellement affirmée la réalité de ces « masses minérales » arrivées « du dehors de notre atmosphère », comme le supposa dès 1794 le grand physicien allemand Chladni, se heurtant à l’incrédulité de la communauté savante. On s’efforcera de montrer comment le rapport de Biot, mettant fin, sur le plan scientifique, à certaines croyances et superstitions que le mot « météore » a longtemps charriées, a contribué à démarquer la météorologie de l’astronomie ; il a également permis d’opérer une « distinction » (Matthieu Gounelle) entre prodige et objet de connaissance. C’est grâce à une démarche nourrie par la philosophie sensualiste qui le conduit à prendre en considération les témoignages des sens, au plus proche aussi de la réalité sociale des campagnes françaises, que Biot parvient à élucider un objet jusqu’alors perçu comme sacré. Peu après, étape suivante du processus, l’objet désormais scientifique qu’est la météorite entrera dans les musées : cette « capture » reviendra à séparer finalement le monde des choses et celui des hommes. Mais cette séparation que la science du XIXe siècle pense nécessaire ne relève-t-elle pas d’une nouvelle croyance ?

The report by Jean-Baptiste Biot, then the youngest member of the Académie des Sciences, Relation d'un voyage fait dans le département de l'Orne, Pour constater la réalité d'un météore observé à L'Aigle le 6 floréal an 11, is a model in terms of scientific approach. Based on a genuine field survey, at the end of a ten-day trip to the site (7-16 Messidor, 26 June-5 July), the subject of which was the strange "meteor" that had fallen from a "small black cloud" into a serene sky on a fine spring day (26 April 1803), Biot demonstrates the extraterrestrial nature of meteorites. The inhabitants of this precisely circumscribed and mapped area of the Orne almost all described themselves as "eyewitnesses [...] to a dreadful shower of stones [...] thrown up by the meteor". In this sense, the word "meteor" used in the report was the last straw: the L’Aigle phenomenon was not a “meteor”, but a meteorite. A few years later, the word "meteorite" would come to mean "an extraterrestrial rock found on the Earth's surface". Visual and audio testimonies from local residents, most of them farmers, described a "meteor" that had left a small black crackling cloud. The belief in an exceptional and frightening meteorological phenomenon prevailed. Up until then, "stone showers" had fallen into the category of "prodigious meteors", in the same way as toad showers or blood showers. Although Diderot's Encyclopaedia, in the article entitled "METEORS", distanced itself from the marvellous by assuming a natural cause for some of these phenomena, it was not until Biot's report that the reality of these "mineral masses" arriving "from outside our atmosphere" was formally affirmed, as the great German physicist Chladni had assumed in 1794, in the face of the incredulity of the learned community. We will endeavour to show how Biot's report, by putting an end, on a scientific level, to certain beliefs and superstitions that the word "meteor" had long carried, helped to distinguish meteorology from astronomy; it also made it possible to make a distinction between prodigy and object of knowledge. Thanks to an approach informed by sensualist philosophy, which led him to take into account the testimonies of the senses, as close as possible to the social reality of the French countryside, Biot succeeded in elucidating an object that had hitherto been perceived as sacred. Shortly afterwards, the next stage in the process, the meteorite, now a scientific object, was to be exhibited in museums. But wasn't this separation, which nineteenth-century science believed to be necessary, part of a new belief?

document thumbnail

Par les mêmes auteurs

Sur les mêmes sujets

Sur les mêmes disciplines