2021
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Gérard Aubin et al., « Chapitre 7. De 20 av. J.-C. à 15 ap. J.-C., la fin (phase 6) », Éditions de la Maison des sciences de l’homme
La phase 6 débute par la démolition de la plupart des bâtiments et des clôtures et la récupération systématique des matériaux [fig. 151].Seule une construction semble encore occupée dans l’angle sud-est de l’ancienne avant-cour. Le fossé d’enceinte de la basse-cour se comble progressivement avec la pierraille de la fortification démantelée [fig. 152]. Les objets mis au jour dans le fossé de l’avant-cour, à proximité du bâtiment encore debout, permettent de dater ces travaux de la fin du ier s. av. J.-C. et du début du siècle suivant [fig. 153]. Une palissade nord-sud traverse l’ancienne avant-cour sans tenir compte de ses limites [fig. 154]. L’analyse de répartition confirme la présence très sélective du mobilier antique dans certaines parties de la résidence [fig. 155]. Dans l’ancienne cour d’habitation, les deux puits sont comblés.La typologie de la céramique [fig. 157] et la seule monnaie de la résidence [fig. 158] montrent que la démolition s’est poursuivie au moins jusqu’aux années 15 ap. J.-C. Au début de cette phase, les deux tumuli de l’âge du Bronze, au sud-ouest de la résidence, sont ceints d’une clôture [fig. 159]. Il a fallu pour cela dévier la voie gauloise, d’abord au nord puis au sud. Les fragments d’amphores qui ont servi à combler une partie d’un fossé bordier et d’un petit exutoire datent ces travaux du dernier quart ier s. av. J.-C. [fig. 160].La clôture de l’espace en forme de navette ainsi défini, composée dans un premier temps d’un fossé bordé d’une palissade [fig. 161], comporte deux accès dont l’un a été plusieurs fois refait [fig. 162]. Un espace rituel a été aménagé sur le flanc est du tumulus oriental. Des dizaines de monnaies y ont été retrouvées, enfouies dans une fosse qui pourrait avoir contenu un tronc à offrandes, ou fichées verticalement dans le tertre, à l’emplacement d’un petit bâtiment presque carré (3,50 × 3,70 m) sur poteaux de bois [fig. 163]. Sur le sommet du tertre, une vaste fosse servait à maintenir un poteau [fig. 164a], et au nord plusieurs chablis sont tout ce qu’il reste de cinq arbres [fig. 164b].Des fours et des foyers culinaires étaient éparpillés dans l’angle sud-est de l’enclos [fig. 165], près de deux bâtiments maçonnés, carrés eux aussi. Le premier (5,50 × 5,20 m) était adossé au muret installé sur l’ancien fossé de clôture [fig. 166]. Le second (4,60 × 4,60 m) comportait probablement une galerie ou une toiture débordante, d’après l’organisation au sol des restes de sa toiture. À côté, quatre dalles posées à plat et une fondation maçonnée ont pu supporter des autels. Ces édifices construits après le milieu du ier s. ap. J.-C. ont été démolis vers la fin du iiie s. ap. J.-C. [fig. 167].Des 51 monnaies retrouvées dans l’enclos [fig. 168], la plus ancienne est un statère gaulois en or allié (réf. inv. 24) [fig. 170]. Le reste de l’ensemble est constitué d’espèces en alliage cuivreux, à l’exception d’un denier (réf. inv. 55) et d’un antoninien (réf. inv. 51) qui sont fourrés et saucés d’argent [tabl. iii]. Les imitations représentent le quart du lot. Pour l’essentiel, ces frappes s’inspirent de types julio-claudiens. Elles témoignent de difficultés d’approvisionnement en numéraire dans la région au début de l’Empire, malgré l’activité des ateliers gaulois de Nîmes et de Lyon dont sont issues ou inspirées la quasi-totalité des monnaies frappées entre la fin du ier s. av. J.-C. et l’époque flavienne qui ont été recueillies. Leur caractère votif s’appuie sur trois constatations : leur nombre, bien supérieur à ce qu’il est habituellement en Bretagne dans les habitats, leur localisation, à la périphérie immédiate de la fosse, et leur position, qui montre qu’elles ne peuvent avoir été perdues. L’argument le plus net est la mutilation de certaines d’entre elles [fig. 169], un fait remarquable, constaté sur plusieurs lieux de culte dès le début de l’Empire. La seule hypothèse probante est qu’il s’agit de monnaies sacrifiées, donc soustraites à l’usage profane, dans un geste cultuel plutôt que politique qui consiste à les démonétiser pour s’assurer de la pérennité du don (Aubin, Meissonnier 1994 : 146). Les entailles affectent exclusivement des monnaies d’Auguste, de Tibère ou de Claude, le statère osisme ayant pu circuler durant les dernières décennies précédant notre ère. Aucune des monnaies plus tardives ne porte de traces de coups, ce qui inscrit le lot dans l’évolution des pratiques rituelles au ier s. ap. J.-C. (Popovitch 1995 : 363). Concernant les fragments de figurines, seul leur regroupement dans le bâtiment F2 conduit à les interpréter comme des offrandes. Objets à caractère rituel plutôt que votif, les quelques céramiques –notamment les pichets et les vases à bec verseur [fig. 171]– et les verreries signeraient la consommation d’aliments ou de boissons dans l’enclos, une pratique habituelle dans les sanctuaires ruraux antiques. La clochette découverte en 2016 [fig. 172] fait partie des objets fréquemment mis au jour dans les sanctuaires, comme Mauves-sur-Loire / Vieille Cour (Monteil et al. 2009 : fig. 24) ou Mandeure (Barral 2007).L’intégration des deux tombes de l’âge du Bronze dans une enceinte [fig. 173] indique bien un choix topographique spécifique, susceptible de favoriser le contact avec certains dieux et de participer à la définition d’un lieu sacré. La date de fondation du sanctuaire, fixée à la dernière décennie du ier s. av. J.-C., soit au moment de l’organisation en cités des territoires conquis par César, pourrait être liée à la volonté d’établir un culte funéraire faisant valoir l’ancestralité et donc le caractère vénérable d’une famille aristocratique, à un moment très sensible de profondes mutations politiques et sociales.La démolition de la résidence débute ainsi vers 20 av. J.-C. et se poursuit durant presque une génération, jusque vers la fin du règne d’Auguste ou le tout début de celui de Tibère. Mais loin de chercher à en effacer toute trace, des travaux importants ont été engagés pour en pérenniser la mémoire. Les occupations postérieures n’ont laissé que peu de traces. Les voies demeurent en usage. Un fragment de vase du ive s. ap. J.-C. est abandonné dans l’un des souterrains [fig. 156], celui-ci étant temporairement redevenu accessible à la suite d’un tassement des remblais et d’un éboulement. Pendant la période moderne, un parcellaire constitué de talus bordé de fossés sera implanté sur la ligne de crête, dans le cadre d’une mise en culture de cette zone pourtant difficile à exploiter, avec ses terres peu épaisses recouvrant à peine les schistes et les grès armoricains.