2009
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Philippe Chanson, « « Rien n’est plus fort que le Bon Dieu ! » », Archives de sciences sociales des religions
Le conte créole est l’exemple d’un phénomène historique de traduction engageant plus qu’un fait religieux: le référent croyant ultime qu’est le Dieu d’une religion – en l’occurrence celle du christianisme. Parole de résistance sous son apparence ludique, il tient le rôle de substitut de mythe qu’il reconstitue au sein des sociétés antillo-guyanaises issues de la traite, soumises à l’esclavage et recréées à partir d’une situation de dépossession anthropologique totale. C’est de cette mémoire blessée – et théologiquement blessée – qu’il a pris corps. Habilement convoqué par le conteur, champion des paroles de détour prononcées autrefois dans la nuit de la Plantation (à la barbe des maîtres colons!) s’y est inscrit, traduit et pérennisé le dieu chrétien sous une forme inévitablement et stratégiquement associée à la figure du maître esclavagiste, présence omnipotente qu’il faut à la fois se concilier et tenter de rouler. En ce sens, le conte créole, qui exige une lecture palimpseste, reste le témoin original d’une traduction culturelle et spirituelle sans aucun doute totalement imprévue par le colonialisme mais dont les effets pérennes sont toujours latents en pays créoles.