2006
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https://doi.org/10.4000/ebc.12275
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Laurence Petit, « Textual and Pictorial Distortions: Sublimity and Abjection in A. S. Byatt’s ‘The Chinese Lobster’ », Études britanniques contemporaines
Au cours de ces dernières années, nombre de critiques tels que Mieke Bal ou W. J. T. Mitchell ont cessé de considérer la relation entre texte et image en termes d’émulation (le célèbre ‘Ut Pictura Poesis’ d’Horace) ou de rivalité (le non moins fameux ‘Paragone’ de Léonard de Vinci) pour la re-penser sous la forme d’une interaction dynamique, d’un dialogue fertile ou encore d’une transaction ou translation. La fascination qu’éprouve depuis longtemps A. S. Byatt pour ces deux modes d’expression trouve son expression la plus frappante dans son recueil de nouvelles datant de 1993 et intitulé The Matisse Stories. Plus qu’un simple hommage au grand maître du modernisme, le recueil dans son ensemble peut se lire comme une tentative pour contester la distinction traditionnelle entre les ‘Arts Frères’ (the Sister Arts) en produisant un objet hybride, ou ‘iconotexte’, à la frontière du textuel et du pictural.La troisième et dernière nouvelle dans le recueil, ‘The Chinese Lobster’, utilise de facon radicale ces variations intermédiales afin d’interroger la représentation littéraire. À travers une série de distorsions verbales, picturales et corporelles, non seulement cette nouvelle met en scène, tout en en faisant la satire, des questions chères aux féministes, mais elle re-pense aussi l’interaction entre texte et image en termes d’une transgression ou ‘distorsion’ produisant une nouvelle forme iconotextuelle. Plus généralement, cette nouvelle permet de re-penser la représentation littéraire en termes d’une inévitable ‘distorsion’ ou ‘déformation’, la représentation contenant par essence son propre échec.S’inspirant du concept de ‘grotesque’ décrit par Bakhtine et de celui d’‘informe’ décrit par Bataille, cet essai explore ce que Kristeva appelle le royaume de ‘l’abjection’ dans ses relations avec son double antithétique, le sublime, tel que l’ont théorisé Longinus, Burke et Kant, et, plus récemment, Lyotard. En se présentant comme une traversée symbolique et cathartique de l’abjection et de la mort avant une renaissance de nature épiphanique au miracle de la vie grâce à l’art de Matisse, ‘The Chinese Lobster’ peut se lire comme célébrant non seulement Matisse mais aussi ce que l’on peut appeler plus généralement ‘le sublime de l’art’, cet ‘innommable’ ou ‘irreprésentable’ au cœur même de la représentation.