Les « dominés » peuvent-ils créer ?

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2014

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  • 20.500.13089/kupy
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Lionel Arnaud, « Les « dominés » peuvent-ils créer ? », SociologieS


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Un accord croissant semble se faire aujourd’hui pour admettre que l’opposition entre « démocratisation de la culture » et « démocratie culturelle » ne doit pas être abusivement durcie. Non seulement parce que certains travaux rappellent que la justice implique à la fois la redistribution et la reconnaissance, mais aussi parce que le rôle des « intellectuels » (qu’ils soient artistes, professionnels de la culture, travailleurs sociaux, universitaires, ou plus généralement militants…) s’avère à chaque fois déterminant. Car comme l’ont montré des auteurs aussi différents que Gayatri Spivak ou Pierre Bourdieu, en désignant comme « culturels » les objets traités par leurs interventions – à l’exclusion d’autres – ces intermédiaires contribuent à produire ou à entretenir les principes de vision et de division du monde social. Mais si leur analyse s’accorde sur l’idée que les populations opprimées « ne peuvent pas parler » parce que leur parole est systématiquement confisquée, l’un et l’autre ne se demandent pas si les « dominés » ou les « subalternes » parlent effectivement, uniquement s’il leur est possible de le faire. En nous appuyant sur trois enquêtes ethnographiques que nous avons conduites entre 2000 et 2012 et qui portaient sur les modalités d’organisation et d’élaboration du carnaval de Notting Hill à Londres, du mouvement hip hop à Lyon et des danses « négro-martiniquaises » à Fort-de-France, cet article entend montrer que si l’audience politique des « dominés » n’est possible qu’au prix de la traduction – et donc de la trahison – de leur parole dans un langage politique déjà constitué, cela ne signifie pas qu’ils ne peuvent accéder à la réflexivité. Nous montrons en particulier que ces pratiques culturelles doivent être appréhendées moins comme des objets, des savoir-faire ou des capitaux à acquérir que comme des processus créatifs qui peuvent être mobilisés par « n'importe qui » et qui sont susceptibles de favoriser une forme de réflexivité et de distanciation sur le monde – et donc de capacité à le comprendre et le maîtriser symboliquement.

A growing agreement seems to be made today to admit that the opposition between "democratization of the culture" and "cultural democracy" must not be wrongly hardened. Not only because certain studies stress that the justice implies at the same time the redistribution and the recognition, but also because the role of the "intellectuals" (artists, professionals of the culture, social workers, researchers, or more generally militants) turn out every time determining. As showed authors so different as Gayatri Spivak or Pierre Bourdieu, by pointing out as "cultural" objects handled by their interventions - with the exception of other - these intermediaries contribute to produce or to maintain the principles of vision and division of the social world. But if this analysis agrees on the idea that the oppressed populations "cannot speak" because their word is systematically seized, both do not wonder whether the "dominated" or the "subalterns" speak actually, only if it is possible for them to do it.Based on three ethnographical surveys that we led between 2000 and 2012 and which concerned the modalities of organization and elaboration of the Notting Hill carnival in London, the hip-hop movement in Lyon and the “negro-traditions” in Fort-de-France, this article intends to show that if the political audience of the "dominated" is possible only for the price of the translation – and thus of the betrayal – of their word in an already established political language, it does not mean that they cannot reach the reflexivity. We show in particular that these cultural practices must be less understood as objects, know-how or capital to acquire that as creative processes which can be mobilized by "anyone", and which may favor a kind of reflexivity and distancing on the world – and thus of capacity to understand it and to master it symbolically.

¿Los « dominados » pueden crear algo? La acción cultural de las « minorías étnicas »: mito y realidadParece verosímil que nos estamos poniendo de acuerdo para admitir que la oposición entre la « democratización de la cultura » y la « democracia cultural » no es radical. No solo porque ciertas investigaciones hacen hincapié en que la justicia implica simultáneamente la redistribución y el reconocimiento sino también porque el papel de los « intelectuales » (artistas, profesionales de la cultura, trabajadores sociales, universitarios y más generalmente los « militantes ») es siempre determinante porque como lo han demostrado autores tan diferentes come Gayafry Spivak o Pierre Bourdieu, cuando se designan como « culturales » los sujetos tratados en sus investigaciones -independientemente de otros temas tratados- esos intermediarios contribuyen en la producción o en la perpetuación de los principios de visión y de división de la sociedad. Pero si sus análisis concuerdan sobre la idea que los sectores oprimidos « no pueden expresarse » ya que sus voces son confiscadas sistem1aticamente, un autor como el otro no se plantean si los « dominados » o los « subalternos » se expresan realmente cuando es posible hacerlo.Basándonos en tres encuestas etnográficas que hemos llevado a cabo entre los años 2000 y 2012 sobre los modos de organización y de elaboración en Londres del carnaval de Notting Hill, del movimiento hip hop en Lyon y de los bailes « afroantillanos » en Fort-de-France, este artículo pretende demostrar que si la audiencia política de los « dominados » solo es posible cuando se traducen (con la traición consiguiente que ello conlleva) de la expresión dentro de un paisaje político establecido, esto no significa que no puedan alcanzar un cierto nivel de reflexión. Ponemos particularmente en evidencia que estas prácticas culturales deben ser comprendidas no como objetos, técnicas o capital cultural sino como procesos creativos que pueden ser utilizados por cualquiera y que son susceptibles de favorecer maneras de reflexionar y de distanciarse con respecto al exterior y por consiguiente el desarrollo de la capacidad de comprensión y de dominio simbólico.

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