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Fonds Jean-Pierre Olivier de Sardan [Fonds ou collection]
Olivier de Sardan et al., « Le secrétaire du palais royal d'Allada au Bénin raconte le parcours du roi au pouvoir et l’histoire du vaudou à l’époque coloniale », Archives de la recherche & Phonothèque MMSH dans Calames
Le secrétaire du palais royal d’Allada fait le récit du parcours d’un futur roi. D’abord adepte vodounou, il occupe ensuite le statut de prêtre pendant 14 ans avant d’être élu roi. A cette époque, tous les princes étaient associés à une divinité transmise de génération en génération avant d’être nommés prêtres. Au moment de la colonisation, les français ont mis en place une administration qui s’appuyait sur les chefs de cantons et le contrôle et ont réorganisé le culte vaudou. Chaque prêtre devait alors rendre des comptes à son chef de canton. Vers 1945, une réforme de l’administration coloniale et de la députation s’est mise en place et les chefs de canton deviennent responsables des affaires administratives ; le vaudou est mis à l’écart. C’est le moment où le roi reprend ses droits et le contrôle sur tout le culte. Le retour du vaudou à été voté par un administrateur colonial, nommé Paul Anthony. Pour toute cérémonie (avoir de la pluie, éviter les calamités, etc) une permission doit être demandée au roi. Chaque roi a appliqué des cycles de cérémonies différents : d’abord tous les treize mois, ces cycles sont passés à tous les deux ans, puis tous les quatorze mois, pour terminer sur un cycle de vingt-quatre mois. Une cérémonie des grandes coutumes étant très onéreuse, les vaudounous de la région se devaient d’y contribuer. Pour le repas commun, il fallait cinq bovins et un bœuf pour l’ancien roi offert au temple des ancêtres, trois jours après la cérémonie. Il est devenu difficile de subvenir à ces frais car non seulement les prix ont augmenté mais les habitudes de consommation ont changé. A l’époque des colonies, le fonctionnement était soutenu financièrement par l’administrateur et la population, ce qui n'est plus le cas aujourd’hui. Les rites sont maintenus, mais le nombre de sacrifices est réduit et les cérémonies sont de moindre importance. Autrefois, il était conseillé au jeune roi de résider trois mois au couvent de la chefferie alors que sept jours suffisent aujourd'hui. Un vice-roi est nommé dans chaque village pour travailler avec les prêtres, superviser les vaudounous, guider les adeptes et rendre compte au Grand roi. La royauté est dite "prédestinée" et ce n'est pas nécessairement le fils du défunt qui sera élu. Le témoin revient sur l’explication et la signification des différents noms des derniers chefs de communautés et des rois. L’informateur explique qu’il existe trois chefs de communauté (la retranscription des noms est incertaine) : le premier [Tarourou] signifie “on ne peut pas griffer un crâne de crocodile” ; le second [Foagada i otoma], pour “quand le couteau se lève, la foule se disperse” ; le dernier [Yu mayor novo] pour ” le noir ne peut pas désigner le blanc comme son oncle maternel”. Il signale également les noms de la lignée des rois, le premier [Cokon], pour "on ne peut mettre la pelle d’un autre à son cou” et le second [Dako], pour “garde ta bouche tranquille” “puisqu’aucun animal ne peut aller brouter sur la poitrine de la panthère”. Le secrétaire du palais royal dresse ensuite la liste des rois béninois dont le souvenir est resté dans les mémoires. Le neuvième roi s’est proclamé gardien des anciennes divinités, son respect pour sles anciens était “comme un bracelet métallique qu’il ferait tout pour lustrer”. Le onzième a régné pendant 47 ans, son nom signifie “pierre précieuse" et il est encore respecté. Le douzième roi, père du quinzième, a régné pendant seulement 15 ans et a été remplacé par le treizième roi qui lui, a régné durant 12 ans. Le treizième roi, appelé [Fiegla] a assisté à la conquête du Niger. Le quatorzième roi régna durant 30 ans. Et finalement le quinzième, qui a hérité du statut de roi par son père et a été accepté par le peuple, a effectué 31 ans de règne. A la fin de l’enregistrement, l'enquêteur et l’informateur vont visiter un édifice religieux dans lequel sont rassemblés tous les anciens rois et où ont lieu les cérémonies.