Victoria Pignot, architecte et enseignante, revient sur son parcours professionnel sous le prisme des questions de féminisme dans les écoles d’architecture

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Date

30 juin 2022

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Victoria Pignot, « Victoria Pignot, architecte et enseignante, revient sur son parcours professionnel sous le prisme des questions de féminisme dans les écoles d’architecture », Archives de la recherche & Phonothèque MMSH dans Calames


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L'enseignante-chercheuse en architecture Stéphanie Dadour structure l'entretien avec Victoria Pignot autour de 4 thèmes qu'elle décline au début de l'enregistrement: la biographie et le parcours professionnel, les questions de féminisme en école d'architecture, le statut des femmes en école d'architecture et les questions d'égalité homme-femmes. Victoria Pignot, architecte et enseignante en école d'architecture, retrace tout d'abord son histoire familiale et les raisons de son choix de devenir architecte. Aimant dessiner, dans une famille ouverte à la culture où le dessin était un métier, avec une mère styliste et un père graphiste, son père l'incite à devenir architecte, comme l'oncle maternel. Diverses expériences architecturales comme la visite de la Villa La Roche, l'appartement familial situé dans l'ensemble immobilier Tour Maine-Montparnasse de Jean Dubuisson surnommé « cage à lapins » par ses camarades d'école, la visite de La Cité Radieuse à Marseille ou le classique pavillon toulousain au jardin nourricier de la grand-mère, la sensibilisent à la notion d'habiter. En 1975, Victoria Pignot intègre l'Unité Pédagogique d'Architecture N°2 et l'atelier de l'architecte Yves Jenkins. Elle décrit les locaux dans l'immeuble construit par l'architecte Jacques Expert et qualifie cette première année de difficile, dans une institution où aucune femme n'y enseigne durant ses trois premières années et où elles ne sont que 3 étudiantes (elle en cite deux). Elle regrette le manque de méthode dans l'enseignement, la frénésie des projets à rendre à une fréquence élevée (tous les quinze jours à trois semaines) . Elle apprécie néanmoins l'enseignement des deux assistants de l'atelier, André Schuch et Jean-Michel Milliex, amis de Philippe Panerai dont elle apprécie notamment l’enseignement des outils de l'analyse urbaine. A l’inverse, Victoria Pignot a toujours cherché des méthodes d'enseignement afin de soutenir les étudiants dans leur apprentissage. Elle souligne, à cette époque, le manque d'apport théorique en architecture, en histoire ou en urbanisme, ainsi qu'un enseignement trop rare du logement. Pour ces raisons, elle quitte l'UP2 pour l'UP6 (Paris-La Villette), où elle trouve l'enseignement théorique qui lui faisait défaut, par exemple avec les enseignements de l’historien Michel Vernes et du philosophe Jean-Paul Dollé. Elle apprécie l'enseignement de l'architecte Fernando Montes, les visites à Paris et en Angleterre ainsi que son séminaire sur les Villas de Le Corbusier au cours duquel les étudiants développaient un processus de travail archéologique de reconstitution du projet de construction de la villa, par le dessin des étapes de la construction ainsi que grâce à la lecture des courriers liés au projet. Au cours de ses études, elle travaille dans diverses agences. En 1983, c'est sous la direction de Fernando Montes que Victoria Pignot passe son diplôme d'état d'architecte qui traite des premières collections de dessin d'architecture, dont elle donne des détails. Elle travaille pendant 8 ans comme chef de projet dans l'agence de Jean-Pierre Buffi, avant de créer sa propre agence avec son conjoint et d'obtenir le prix de la première œuvre pour l'extension du Lycée d'Enghien. D'autres travaux réalisés par l'agence sont cités au cours de l'entretien : extension et rénovation du Collège Jean-Claude Chabanne à Pontoise, construction de l’école maternelle Piver à Paris, réhabilitation de logements de grands ensembles à Saint-Ouen-l’Aumône, construction de logements rue Myrha à Paris ou construction de logements collectifs à La Courneuve. Victoria Pignot reviendra sur la difficulté de concilier vie professionnelle et familiale, alors qu'elle cumule à ce moment-là le travail salarié (qu'elle quitte en 1993) et sa propre agence, puis plus tard avec son travail d'enseignante en école d'architecture. Elle raconte sa motivation et le contexte qui l'amène à passer le concours d'enseignante, ainsi que son déroulement et sa rencontre avec les directeurs de l'école d'architecture de Lille, où elle enseignera jusqu'en 2017. Elle qualifie son entreprise comme une agence d'architecture traditionnelle, avec un côté artisanal et peu de salariés. Victoria Pignot en décrit les spécificités : une grande sensibilité à l'existant, une analyse fine du bâti, la nécessité d’une bonne compréhension de l’architecture avant d'intervenir, une architecture soignée, un continuum entre l'architecte et les futurs habitants, l’attention à la ville, l’attention à l’histoire, et une préoccupation constante de l'usage et de la manière dont les habitants vont habiter les espaces. Sollicitée par l’enquêtrice, Victoria Pignot dit regretter de ne pas avoir fait de la recherche, mais le doctorat n'existait pas à cette époque. Dans la deuxième partie de l'entretien, Stéphanie Dadour commence par s'intéresser au positionnement féministe de Victoria Pignot, qui raconte avoir vécu le mouvement de Mai 1968 à Paris, alors qu'elle était enfant. Elle revient sur l'histoire de sa mère et grand-mère qui ont regretté d'avoir dû se consacrer uniquement aux tâches familiales, par nécessité et obligation. A son arrivée à l'UP2, Victoria Pignot relate qu'il n'existait aucune sensibilité au féminisme, contrairement à l’UP8 (Paris-Bellevile) où, dans l’entourage de l’architecte Bernard Huet, féministes et personnes homosexuelles étaient visibles. Pour autant, ses amies d'UP8 et elle-même devaient se défendre des hommes « qui se croyaient tout permis », notamment avec des réflexions grossières auxquelles elles répondaient vigoureusement. L'entretien s'oriente, dans sa troisième partie, sur son statut d'enseignante. A son arrivée à l'école d'architecture et de paysage de Lille, Victoria Pignot a du imposer son intérêt pour le logement, à une époque où l'école et certains professeurs étaient essentiellement tournés vers la conception de musées au détriment du logement, ce qu'elle a pu finalement réussir à faire avec un nouvel assistant et grâce à la nouvelle organisation mise en place par le président du conseil d’administration Philippe Louguet : une année, un thème réparti en 2 semestres. L'enquêtrice souhaite comprendre ce qui a nourri la construction de son enseignement. Comme elle l'a déjà évoqué précédemment, marquée par une carence méthodologique dans sa propre formation, Victoria Pignot propose des méthodes qui prennent le projet par diverses entrées afin que les étudiants, si différents soit-il, puissent s’en saisir. L'enseignement était prodigué en binômes et ils organisaient des visites de bâtiments dans Lille qu'ils confrontaient aux références historiques. Elle revient sur la difficulté de concilier vie professionnelle et familiale, mais également rappelle combien il était mal vu et combien elle a dû se positionner fermement, lorsqu’elle était salariée, pour qu'il soit acquis de terminer la journée de travail le soir à à 19h. Malgré ces difficultés elle pense ne pas avoir perdu d'opportunité et avoir réalisé ce qu'elle souhaitait professionnellement, hormis de faire de la recherche. Lorsqu'elle est arrivée à l'école d'architecture de Lille, il y avait très peu de femmes, mais le président du conseil d’administration étant très favorable à leur présence au sein de l'école, d'autres sont arrivées, dont elle cite les noms. C'était tout l'inverse à l'école de Paris-La Villette, où, à son arrivée en 2017, il y avait très peu de femmes dans la discipline Théorie et Pratique de l’Architecture, hormis la sous-directrice. L'enquêtrice questionne le témoin quant à l'apport des femmes au sein des écoles. Au travers d'une comparaison entre les 2 écoles, Victoria Pignot évoque la structuration méthodologique des enseignantes femmes, la prise en compte réelle des étudiants mais rappelle que les équipes mixtes apportent une grande richesse, aussi bien dans l'enseignement que dans les jurys. Sollicitée par l'enquêtrice, Victoria Pignot revient sur des moments clés de son parcours d'enseignante. Elle cite le Projet de fin d'études (PFE) sur un semestre, créé par la réforme de 2005. Elle raconte sa participation à la refonte des programmes à Lille et la création du domaine d'études Histoire, théories, projets dont Richard Klein faisait partie (plus tard dans l'entretien, elle raconte que les domaines d'études ont été créés en 2018 à l'ENSA Paris-La Villette). Elle décrit un exercice qu'elle proposait aux étudiant·e·s dans lequel, pendant 15 jours, à travers la lecture d’un livre d’architecte (elle en cite plusieurs, de Léon Battista Alberti à Jean Nouvel), chaque étudiant devait dégager les éléments clé des théories de l'architecte étudié et s’en servir dans la conception de leur projet. Stéphanie Dadour note que le témoin évoque certaines différences entre les femmes et les hommes enseignant·e·s et en questionne l'origine. Victoria Pignot donne des pistes comme le souhait de réalisation d'un chef d’œuvre ou la croyance en une créativité mystérieuse chez les hommes et d’autre part des méthodes d’enseignement davantage construites chez les femmes. La dernière partie de l’entretien revient sur la question du féminisme et de l’égalité homme-femme. Le témoin dit adhérer au collectif Architoo et avoir souhaité intégrer des fonctions décisionnaires au sein de l'école afin de « faire changer les choses », faire évoluer la pensée masculine vis-à-vis des femmes. Elle donne des exemples de faits inacceptables et rappelle la nécessité d'une vigilance active constante. Plus tôt dans l’entretien, elle évoque également les visites de chantier qui pouvaient être difficiles, relativement aux rapports hommes-femmes. Mais elle donne également des exemples où la nouvelle génération masculine reprend à son compte les idées féministes en défendant par exemple la parité au sein des écoles. Elle cite le chiffre de seulement 30% de femmes à l'ENSA Paris La Villette, au moment de l'enregistrement. A son arrivée dans l'école, elle raconte comment sa prise de poste d'enseignante a été marquée par des attitudes individuelles et structurelles, de misogynie et d'abus de pouvoir envers elle. Ensuite, grâce à son intégration dans les instances décisionnaires de l'école, elle a pu promouvoir l'arrivée des femmes à l'école de La Villette, amorçant ainsi une nouvelle ambiance de travail, davantage d'interdisciplinarité et de motivation à envisager des dispositifs pédagogiques. En conclusion, Victoria Pignot constate une amélioration de la place des femmes, tout en relatant de récents propos misogynes dans son environnement professionnel. Au cours de l’entretien Victoria Pignot cite de nombreuses personnes, architectes, enseignants ou collaborateurs.

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