2004
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Jean Flori, « Pour une redéfinition de la croisade », Cahiers de Civilisation Médiévale, ID : 10.3406/ccmed.2004.2891
La définition de la croisade a donné lieu à de rudes affrontements entre traditionalistes (ou puristes) et pluralistes. Les premiers posent a priori que seules doivent porter ce nom les expéditions armées prêchées par le pape contre les musulmans occupant la Terre sainte en vue de la libération des églises et des Lieux saints de Palestine, limitant ainsi géographiquement et chronologiquement le phénomène de la croisade. Les seconds, au contraire, accordent cette dénomination de croisade à toutes les entreprises militaires qui, prêchées par le pape contre les ennemis divers de l'Église (musulmans, païens, hérétiques, schismatiques, adversaires politiques de la papauté), en quelque région que ce soit et à quelque époque que ce soit, ont été assorties par le pontife romain des indulgences de croisade initiées par Urbain II. Les uns, à la suite de C. Erdmann et de H. E. Mayer, soulignent la continuité idéologique entre la guerre juste, la guerre sainte et la croisade ; les autres, adoptant les critiques de cette thèse énoncées entre autres par J. Riley-Smith et C. Morris, préfèrent parler de pèlerinages armés méritoires et soulignent au contraire la rupture établie entre ces deux phénomènes par l'introduction des indulgences et du caractère pénitentiel de la croisade. Les uns et les autres, enfin, répugnent à accorder le terme de « précroisades » aux entreprises de reconquêtes chrétiennes antérieures à 1095, et à classer comme croisades les mouvements populaires qui, même lorsqu'ils ont pour objectif la libération du sépulcre du Christ, sont issus de prédications que le pape n'aurait pas initiées ou cautionnées. Après un examen critique des thèses en présence, l'auteur propose ici une approche méthodologique du phénomène permettant d'aboutir à une définition simple et cohérente de la croisade.