1994
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Jean-Louis Le Moigne, « Sur la capacité de la raison à discerner rationalité substantive et rationalité procédurale », Cahiers d'Économie Politique, ID : 10.3406/cep.1994.1168
"L'Economie progressera avec l'approfondissement de notre compréhension des processus de pensée humaine. Et l'économie changera lorsque les hommes et les sociétés humaines amélioreront leurs outils de pensée pour élaborer leurs décisions et concevoir leurs institutions. Uin corps de théorie pour la rationalité procédurale est compatible avec un monde dans lequel les humains continueront à penser et à inventer. Une théorie de la rationalité substantive ne l'est pas. " (H. A. Simon, "From Substantive to Procedural Rationality", 1976). Une conclusion aussi forte ne mérite-t-elle pas d'être réfléchie et discutée, en particulier par les sciences économiques auxquelles elle fut initialement adressée ? En reprenant quelques unes des grandes étapes de l'histoire du concept de Rationalité dans la pensée scientifique (les pré-socratiques et Aristote, R. Descartes et G.B. Vico, G. Boole et J.B. Grize...), on se propose d'argumenter la légitimité et la portée de la distinction proposée par H. A. Simon entre les deux formes de rationalité, " Substantive " et "Procédurale". On montre que la première rend compte des formes de raisonnements déductifs ou syllogistiques exprimés aujourd'hui par "les logiques formelles" et toutes fondées sur les trois axiomes du syllogisme établis par Aristote (la plupart confondant en outre la Négation formelle et la Contradiction signifiante) ; et que la seconde rend compte des formes de raisonnements dialectiques ou rhétoriques, exprimés aujourd'hui par "les logiques naturelles" et fondés sur des hypothèses de plausibilité et de faisabilité conjonctives et téléologiques. Les conséquences de cette distinction pour la modélisation des systèmes complexes et des projets d'intervention dans les systèmes complexes sont succinctement évoquées.