1992
Copyright PERSEE 2003-2024. Works reproduced on the PERSEE website are protected by the general rules of the Code of Intellectual Property. For strictly private, scientific or teaching purposes excluding all commercial use, reproduction and communication to the public of this document is permitted on condition that its origin and copyright are clearly mentionned.
Michael King et al., « La notion d'intérêt de l'enfant en droit : vecteur de coopération ou d'interférence ? », Droit et Société (documents), ID : 10.3406/dreso.1992.1190
Le développement majeur des sciences « psy », d'une part, et l'augmentation concomitante des désordres familiaux, en particulier du nombre de divorces, d'autre part, ont favorisé l'émergence, au travers de la notion d'intérêt de l'enfant, d'une relation entre droit et sciences « psy ». Selon une approche classique, cette relation se traduit par la réalisation d'une pratique interdisciplinaire et d'une coopération entre juges et intervenants « psy ». Or, l'analyse de cette même relation par application de la théorie autopoiétique exposée tout d'abord par Niklas Luhmann puis, plus récemment, par Gunther Teubner, démontre l'incompatibilité des deux systèmes du droit et des sciences « psy » : leurs objectifs, leurs fonctions sociales et leurs procédures de validation de la vérité diffèrent. Aussi n'est-il pas surprenant d'observer que la participation des intervenants « psy », lors des procédures d'attribution de la garde ou d'un droit de visite aux parents en instance de divorce ou divorcés, a pour corollaire la distorsion du savoir et de la pratique « psy », en conformité avec les procédures du système juridique. Dans le droit, les sciences « psy » sont reconstruites en communications juridiques et leur validité se trouve donc établie par application des procédures propres à ce système ; elles deviennent, ainsi, « psychologie-en-droit » et « psychiatrie-en-droit », c'est-à-dire des discours asservis. Loin d'élaborer de nouveaux modes de résolution des conflits dans le sens d'une meilleure protection de l'intérêt de l'enfant, cette association entre le juge et l'intervenant « psy » débouche sur le phénomène d'interférence : l'asservissement par le droit du savoir et de la pratique « psy ». Cependant, par ce processus le droit donne l'impression d'être plus à même de résoudre les conflits interpersonnels dans l'intérêt bien compris de l'enfant, alors qu'en réalité, il ne fait que réduire la complexité de ces situations selon son propre code légal/illégal.