1994
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Michèle Bordeaux, « Le sang du corps du droit canon ou des acceptions de l'adage « Ecclesia abhorret a sanguine » », Droit et Société, ID : 10.3406/dreso.1994.1292
La doctrine canonique enseignée et transmise donne à l'adage « Ecclesia abhorret a sanguine » une signification restreinte. Elle valorise les vertus de paix et de douceur de l'Institution et la juste sanction dont elle frappe les actes personnels de violence homicide entre chrétiens. Or l'extension des exonérations accordées (légitime défense contre les hérétiques, office public des Princes libérateurs et de leurs soldats) montre les limites de l'habituelle traduction de l'adage latin : « L'Église déteste faire couler le sang. » Le statut du sang dans le corps du droit canon doit au contraire être restitué lato sensu : « L'Église hait le sang qui coule. » Le sang est un agent polluant et toujours contaminant (ainsi que le sperme, autre liquide vital). La « communion des sangs » lors d'une relation charnelle (dans ou hors mariage) communique une parenté consanguine d'affinité porteuse d'interdit incestueux. L'hérésie... et la foi catholique... se transmettent par le sang (statuts espagnols de pureté du sang). Le sang (comme le sperme) pollue les lieux saints où il serait émis (accouchement, menstrues) et contribue à exclure les femmes du Sacré.