1996
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Marguerite-Marie Parvulesco-Oya, « Imitation et création littéraire, la poésie de lettrés à l'époque d'Edo », Ebisu - Études Japonaises, ID : 10.3406/ebisu.1996.1604
Les kanshi, poèmes composés en chinois par les japonais, présentent une double difficulté d'approche, d'une part un mode de composition qui dissocie la langue de l'écriture et la langue de la lecture, puisque ces poèmes étaient écrits en chinois mais lus en japonais, et d'autre part, un idéal d'imitation des modèles chinois allant à contre courant de la conception moderne de la création littéraire. Pour les lettrés chinois et japonais, l'imitation de vers célèbres est avant tout une forme de citation, dont le rôle est, à travers la référence à des poèmes antérieurs, de conférer à leur propres poèmes une dimension supplémentaire. Dans ce sens, l'imitation n'entraîne pas la ressemblance avec les vers "imités", elle n'est pas davantage conformisme, ni négation de la liberté du poète, mais elle a favorisé l'élaboration d'une poétique de l'expression indirecte dont l'intérêt ne se limite pas au domaine spécialisé des rapports entre littératures chinoise et japonaise. La lecture des kanshi, en nous obligeant à réfléchir sur le rôle de l'imitation, la valeur de l'originalité, l'intérêt de la nouveauté, la liberté d'écriture du poète et d'interprétation du lecteur, nous incite à remettre en question certaines de nos idées reçues les mieux établies, et à poser ainsi un regard neuf sur la poésie.