2003
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Yosr Zaouali et al., « Diversité génétique des populations naturelles de Rosmarinus officinalis L. (Lamiaceae) en Tunisie », Ecologia Mediterranea, ID : 10.3406/ecmed.2003.1553
En Tunisie, les populations naturelles de romarin (Rosmarinus officinalis L.) se développent, essentiellement au centre et au nord-ouest du pays, dans les étages bioclimatiques s’étendant du sub-humide à l’aride supérieur. Cette espèce se reproduit principalement par propagation végétative. Dans toutes les populations, la régénération à partir des graines est extrêmement rare du fait de la production d’un nombre élevé de nucules non viables et du faible taux d’installation des plantules. La destruction des habitats liée aux activités humaines (ouverture du milieu, surpâturage, collecte, distillation des huiles essentielles), associée au faible pouvoir de régénération d’individus à partir de semis, conduisent progressivement à une diminution du nombre et de la taille des populations. Dix-neuf populations de romarin, prospectées dans différents étages bioclimatiques de la Tunisie, ont fait l’objet d’une analyse du polymorphisme de huit systèmes isoenzymatiques afin d’évaluer leur diversité génétique et mesurer le niveau de leur différenciation. Pour les dix loci polymorphes détectés, l’espèce a présenté une diversité génétique intra-population importante, malgré la prédominance de son mode de reproduction végétative et le faible taux d’établissement des plantules. L’importante diversité génétique dans la population d’origine et les modalités de reproduction allogame pourraient expliquer cette variabilité génétique élevée. Une moyenne de 11,3 % de variation est répartie entre les populations ce qui indique un niveau de différenciation important entre les populations. Au sein de chacun des trois groupes écologiques, la différenciation des populations s’est révélée significative. L’éloignement géographique des populations, s’accordant généralement avec leur localisation bioclimatique et le degré de dégradation des habitats, joueraient un rôle important dans cette structuration. La structuration des populations appartenant à des étages bioclimatiques contigus s’est révélée moins importante que celle observée pour les populations se développant dans des étages séparés. Les valeurs des distances génétiques de Nei (1972), pour l’ensemble des paires de populations, se sont révélées être faibles (0,005< D< 0,232), particulièrement entre populations géographiquement proches. Le dendrogramme, établi à partir de ces indices, a montré la formation de deux ensembles réunissant respectivement (i) les populations du sub-humide et du semi-aride supérieur et (ii) les populations de l’aride supérieur. L’agrégation des populations au sein du premier groupe s’opère selon leur proximité géographique. La forte similarité génétique des populations et leur différenciation substantielle témoigneraient d’une récente isolation des populations sous l’influence des facteurs environnementaux (climatiques et édaphiques) et anthropiques (destruction des habitats intermédiaires). La conservation de l’espèce, in situ, doit concerner dans un premier temps les populations présentant des allèles particuliers. Elle doit s’appuyer sur la multiplication d’individus à l’intérieur de chaque population et la restauration de la végétation forestière, selon le bioclimat, par des essences associées normalement au romarin. La conservation ex-situ, pourrait être abordée par la collecte d’un maximum d’individus au sein des populations caractérisées par des allèles particuliers et leur multiplication dans des conservatoires multilocaux au niveau des différents étages bioclimatiques.