2017
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Christophe Panaïotis et al., « Carte d’état-major de la Corse (1864-1866). Occupation du sol et première analyse des forêts anciennes », Ecologia Mediterranea, ID : 10.3406/ecmed.2017.2005
En France, la carte géographique d’état-major, levée de 1818 à 1866, couvre l’ensemble du pays en 273 feuilles. C’est sous Louis XVIII que la réalisation de cet immense chantier a commencé, en 1817, pour répondre au départ à des besoins civils et militaires. La Corse a été la dernière région française cartographiée (entre 1864 et 1866) ; elle est représentée par 22 feuilles de minutes éditées au 1 : 40 000. La reproduction du relief est la grande nouveauté apportée par ces cartes. Mais elles sont surtout une formidable source de données historiques spatialisées qui nous indique l’occupation du sol par les cultures, les vignes, les marais, les maquis, les forêts ou encore les habitations. À cette époque, le territoire était très ouvert avec 83 % de la surface non boisée où les activités humaines, notamment pastorales, marquaient fortement le paysage (60 % du territoire en pacage ou en parcours). 20 % de la Corse était cultivée et il y avait déjà plus de 7 000 ha de vignes. Concernant la part de la forêt, il y a 150 ans, elle représentait près de 154 000 ha, alors qu’aujourd’hui on l’estime à plus de 500 000 ha (IGN 2013). C’est-à-dire qu’elle a été multipliée par un coefficient 3 pendant cette période. Calculée avec comme date de référence celle de la carte d’état-major, la part des forêts anciennes serait égale à 80 000 ha en Corse. Ce sont vraiment les essences de montagne qui ont gardé le plus longtemps un continuum de leur état boisé, avec les forêts de pin laricio (Pinus nigra subsp. laricio Maire) et de hêtre (Fagus sylvatica L.). A contrario, ce sont les suberaies (chênes-lièges, Quercus suber L.) qui ont payé le plus fort tribut au développement urbanistique et agricole du territoire. Une autre information intéressante que nous apportent les données de l’état-major, est la présence de forêts à l’étage subalpin (entre 1 600 et 2 100 m d’altitude) que l’on ne retrouve plus aujourd’hui. Cependant, depuis quelques décennies, on observe une remontée de quelques essences forestières comme le sorbier des oiseleurs (Sorbus aucuparia subsp. praemorsa (Guss) Nyman.) et l’érable sycomore (Acer pseudoplatanus L.) à ces altitudes, fortement liée à la déprise des territoires d’estives.