2011
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Pierre-Yves Brandt, « Séduction et dévoration dans le parcours d'Ulysse », GAIA. Revue interdisciplinaire sur la Grèce ancienne, ID : 10.3406/gaia.2011.1553
Dans l'œuvre homérique, l'lliade raconte le parcours des héros, dont Achille est le représentant par excellence. L' Iliade nous situe dans le monde de la démesure, celui de la guerre et d'une recherche de divinisation de l'humain par l'accomplissement d'actes sortant de l'ordinaire. Après quoi, l'Odyssée signe le retour à la maison, la réintégration dans le monde de la vie quotidienne, du mariage. Ce retour s'opère par la traversée du monde du merveilleux, que nous pouvons lire comme traversée des fantasmes. Alessandra Lukinovich a mis en évidence l'organisation circulaire du voyage d'Ulysse (« Le cercle des douze étapes du voyage d'Ulysse aux confins du monde », Gaia 3 (1998), p. 9-26). Nous proposons de lire cette traversée comme un voyage initiatique confrontant Ulysse à des niveaux de plus en plus archaïques de l'angoisse de mort. En pénétrant dans le monde de la guerre, Ulysse était entré dans un monde qui transgresse les règles de la vie quotidienne. Au moment de reprendre sa place d'homme marié dans la société, il lui faut retraverser les peurs et angoisses du processus d'adolescence accompagnant le passage de l'enfance à l'âge adulte. Ce processus confronte à l'angoisse d'être capté par les exigences de la vie familiale. C'est ainsi qu'au fil des épreuves, Ulysse affronte des menaces qui se féminisent tout en prenant de plus en plus le visage de la dévoration. Entrer dans la vie conjugale oblige donc à faire le deuil des rêves héroïques de l'adolescent, expression d'un idéal du moi trop investi et pris pour le réel. Des parallèles peuvent être tirés avec les conduites à risque de l'adolescent qui défie la mort pour se sentir exister et savoir qui il est.