2011
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Cécile Dazord, « Art contemporain : l’impensé de la technique », Histoire de l'art, ID : 10.3406/hista.2011.3353
Depuis les années 2000, des publications, colloques et réseaux internationaux para-institutionnels affirment la nécessité de mettre en place une politique conservatoire spécifique en matière de conservation-restauration de l’art contemporain. Au nombre des problématiques identifiées comme majeures et récurrentes, celle de l’obsolescence technologique, autrement dit de l’impact de l’évolution des techniques sur la préservation des œuvres, qui repose, non plus sur l’altération physique des matériaux mais sur la mise hors des circuits de production et de distribution de matériels remplacés par d’autres, présentés comme plus performants. Cela conduit à reconsidérer les principes fondamentaux de la conservation-restauration et à développer des compétences et des cadres méthodologiques appropriés. Plus fondamentalement, la question de l’obsolescence fait surgir celle de la technique et conduit, logiquement, à s’intéresser aux relations complexes et paradoxales que cette dernière entretient avec l’art en général et avec la création contemporaine en particulier. Constitutive des beaux-arts, la distinction entre l’art et la technique apparaît renforcée par l’émancipation des canons et la revendication de l’autonomie jusqu’à l’idiosyncrasie au XIXe puis au XXe siècle ainsi que par les allégations relatives à la dématérialisation voire à l’immatérialité de l’art dans la seconde moitié du XXe siècle. L’ambivalence du discours sur la technique aux époques moderne puis contemporaine, tantôt utopiste, tantôt catastrophiste, se répercute dans l’articulation entre l’art et la technique, au cours de cette période historique : d’un côté la distinction entre l’art et la technique est affirmée comme un principe fondamental et émancipateur, de l’autre, des objets issus de processus de fabrication industriels sont désormais intégrés aux œuvres.