2011
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Pierre Serié, « Tableaux sur scène et sur toile, Paris 1850-1890 », Histoire de l'art, ID : 10.3406/hista.2011.3379
Entre 1850 et 1890, deux générations de peintres - de Charles-Louis Muller à Jean-Paul Laurens en passant par Léon Bénouville et Jean-Léon Gérôme - perpétuent la séculaire notion de peintre d'histoire en entretenant, un commerce aussi régulier, sinon plus, avec les dramaturges parisiens qu’avec les maîtres accrochés sur les cimaises du Louvre. Le théâtre, refondé via l’esthétique du tableau à la fin du XVIIIe siècle, atteint alors un degré d’illusionnisme inégalé et, forme concurrente de production visuelle, force le peintre d’histoire à se positionner vis-à-vis de lui : adhésion ou rejet. L’alternative offerte au peintre est alors la suivante : ou bien faire mieux que la représentation scénique en matière de saturation visuelle (ce seront les propositions de Gustave Doré, par exemple), ou bien le céder au régisseur de théâtre en matière de faste pour mieux redéfinir la spécificité du tableau peint, et réinvestir un temps proprement pictural (économie de la représentation, modes détournés de narration, au-delà du drame, etc.). Telle sera la solution choisie par Gérôme ou Laurens au problème récurrent de la « théâtralité ». Leur succès dans cette entreprise de réinvention du tableau d’histoire fut incontestable : ils parvinrent à renvoyer à ses origines l’épithète « théâtral », c’est-à-dire au théâtre.