2010
Copyright PERSEE 2003-2023. Works reproduced on the PERSEE website are protected by the general rules of the Code of Intellectual Property. For strictly private, scientific or teaching purposes excluding all commercial use, reproduction and communication to the public of this document is permitted on condition that its origin and copyright are clearly mentionned.
Saadi Lahlou, « Contexte et intention dans la détermination de l’activité : une nouvelle topique des motivations », Intellectica, ID : 10.3406/intel.2010.1185
Le problème des bifurcations inopinées de l’activité, illustré par une enquête sur le travail de bureau pose la question de «pourquoi faisons-nous des choses que nous considérons comme peu importantes alors que nous avons des choses importantes à faire ? » qui est problématique pour les théories psychologiques classiques. A partir ce problème banal, on aborde ici la question générale des mécanismes de détermination de l’activité. On présente une analyse critique de la littérature sur la motivation, avec ses paradigmes dominants (homéostasie, utilité espérée) et la théorie des attracteurs cognitifs. L’analyse de leurs limites démontre la nécessité de tenir compte de plusieurs niveaux de détermination de l’activité, au-delà des facteurs classiques de contrainte par le contexte, au niveau du sujet lui-même mais aussi des organes qui le constituent et des organismes dont il fait partie. On postule que le sujet poursuit en permanence plusieurs motifs, dans un cadre plus large que le cadre des théories de la décision qui supposent un espace de problème formellement prédéfini. Pour résoudre ce problème complexe, une nouvelle topique des motivations est proposée, qui se fonde sur la notion spinoziste de «conatus » , en l’opérationnalisant après lui avoir démontré des bases biologiques dans une perspective évolutionniste. La topique est présentée sous deux formes, en compréhension (niveaux logiques successifs de contrôle des ressources de l’environnement correspondant à des anticipations) et en extension (en considérant le sujet comme une série d’entités emboîtées, depuis ses organes propres jusqu’aux super-organismes qui le constituent). Une nouvelle définition, plus extensive, de la notion de sujet permet d’appliquer la notion de conatus aux super-organismes comme les entreprises. Dans ce nouveau cadre, la question étant posée comme l’arbitrage en situation des ressources attentionnelles, psychiques et motrices du sujet entre la satisfaction du conatus de différentes entités présentes, on montre que le phénomène des bifurcations au bureau peut s’expliquer par l’utilisation par les super-organismes de mécanismes phylogénétiques de primauté accordée aux éléments prégnants de la situation pour faciliter la satisfaction de besoins de base de l’entreprise, notamment administratifs.