La cognition comme produit de l’interaction sociale. Un point de vue pragmatiste

Résumé En Fr

Cognition as a Product of Social Interaction : A Pragmatist Point of View. The purpose of this paper is to look into the different types of relationships that might exist between the concepts " interaction" and " cognition". I do so from the standpoint of social psychology : firstly, by stressing the place occupied by social interaction in this discipline and by showing that this place is reserved for verbal interaction ; secondly, by pointing out that most studies conducted on this subject are self-and brain-centered, in a social psychology more interested in individuals in interaction than in the relationships that shape those individuals, and more inclined to adopt a representationalist and mentalist approach whenever it looks at cognitionrelated phenomena ; thirdly, by proposing a description of social interaction as the modeling of linguistic, bodily, and artifactual forms, inscribed in the domain of situated and distributed cognition ; fourthly, by providing some empirical facts illustrating how the cognition process is generated by an interactional dynamic that mobilizes both what is said and what is done by actors who, in an instrumented space, are at the origin of a joint production of forms. In other words, as a social psychologist of collaborative cognitive processes --and from that angle -I will defend an approach that makes cognition a product of social interaction.

L’objectif du texte consiste à s’interroger sur les différents types de rapports que peuvent entretenir les notions d’interaction et de cognition. Nous le ferons du point de vue de la psychologie sociale. Premièrement, en soulignant la faible place qu’occupent les études sur l’interaction sociale dans cette discipline et en signalant que c’est à l’interaction verbale qu’est réservée cette place. Deuxièmement, en pointant le caractère égocéphalocentré de la majorité des études conduites en la matière dans une psychologie sociale qui s’intéresse plus à des individus en interaction qu’à des relations constituant les individus, et qui, quand elle aborde les phénomènes liés à la cognition, adopte une approche représentationaliste et mentaliste. Troisièmement, en proposant ensuite une qualification de l’interaction sociale comme modelage de formes langagières, corporelles et artefactuelles, inscrite dans le domaine de la cognition située et distribuée. Quatrièmement, en donnant quelques éléments empiriques illustrant en quoi le processus cognitif est engendré par une dynamique interactionnelle où sont mobilisés et les dires et les faires des acteurs à l’origine du déploiement, dans un espace instrumenté, d’une production conjointe de formes. Autrement dit, je défendrai, d’un point de vue de psychologue social des processus cognitifs collaboratifs, une approche faisant de la cognition un produit de l’interaction sociale.