1991
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Raymonde Alluin-Popot, « Deirdre des douleurs ou le Romantisme absolu », Etudes irlandaises, ID : 10.3406/irlan.1991.978
Avec Deirdre of the Sorrows, Synge ne se départit pas de sa lucidité et de son réalisme habituels. Pourtant, il semble avoir enrichi le personnage mythique d'un potentiel de sentiments et d'aspirations mis en valeur à l'époque du romantisme. Pour Deirdre, figure de fierté et de défi, rebelle à l'autorité, éprise de liberté, passionnée, absolue dans ses refus et ses désirs, la tentation de l'héroïsme va de pair avec l'exaltation du moi. Image du «surmoi» de l'Irlande en quête de son identité de nation, elle est surtout une incarnation de l'amour tel que le romantisme le valorisait : force irrésistible et subversive qui impose sa propre loi, valeur suprême qui peut tenir lieu de « religion ». « Femme fatale », Deirdre est romantique aussi par sa fidélité à un idéal de passion sans faille, par sa hantise du temps qui passe, ses moments d'introspection, ses nostalgies et sa fureur de vivre intensément. Elle est romantique, de surcroît, par son union quasi mystique avec la nature et par la façon dont elle participe — grâce à sa parole même et à ses décisions — à l'élaboration de son propre mythe et, ce faisant, aspire à une forme d'éternité personnelle.