2001
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Karine-Larissa Basset, « La «Provence sarrasine » : une altérité originelle face à l'Histoire (XIXe-XXe siècles) », Le Monde alpin et rhodanien. Revue régionale d’ethnologie, ID : 10.3406/mar.2001.1736
Si l'histoire du mouvement littéraire pour la «renaissance » provençale a été aujourd'hui bien étudié dans ses thématiques générales — et notamment la constitution de référents de l'identité puisés dans un Moyen Age mythifié —, il est un aspect méconnu de cette élaboration identitaire, l'intrusion, dans le courant du XIXe siècle, de la référence aux Sarrasins comme grands ancêtres du peuple provençal. L'élaboration de cette thématique répond à un projet national totalisant, forme politique prise par la représentation désormais hégémonique de «l'Histoire en marche». Peu à peu, les artisans de la «renaissance» apposent la marque sarrasine à ce que les élites européennes considèrent alors comme les piliers de la «nationalité» : l'Histoire, la langue, le folklore, le sang. Cependant, cette revendication d'une différence originelle fait écho à une image de la singularité occitane forgée par le Nord et largement véhiculée, à partir de la seconde moitié du XIXe siècle, par les descriptions géographiques et touristiques. Mais ce récit de l'altérité des Provençaux ne peut être considéré comme un simple aléa de «l'invention du Midi » par le Nord ; il témoigne, outre de processus de domination et de résistance, d'une nécessité plus anthropologique, relative aux bouleversements engendrés dans les sociétés européennes par la «modernité».