2003
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Christophe Gros, « Georges Amoudruz (1900-1975). Aventures, sciences et libertés au service d'une civilisation de la montagne », Le Monde alpin et rhodanien. Revue régionale d’ethnologie, ID : 10.3406/mar.2003.1810
L'article présente l'œuvre d'un collectionneur, un fonds que possède le Musée d'Ethnographie de Genève. Cet ingénieur, chef d'entreprise et autodidacte eut pour devise : Ce qui importe, c'est la connaissance de la vie populaire à laquelle j'ai consacré ma vie. Avec ses milliers d'objets, d'estampes, de livres et brochures, le fonds couvre un siècle de terrain et de collecte, de lectures érudites et de débats entre les folkloristes, les géographes, les historiens et les spécialistes des Alpes occidentales. La Collection et Bibliothèque Amoudruz forme un archipel d'un savoir faisant converger toutes les sciences, de la géologie à la théologie, du 15e au 20e siècle. Parti d'une première vocation de naturaliste, qui associait science et aventure dans la spéléologie et les fouilles préhistoriques, Amoudruz développe sa propre méthode de relevés et d'examen des sources pour l'étendre à l'ethnographie des massifs de montagne européens. Amoudruz est un enquêteur de tendance monographique. Il cartographie puis démonte, dessine pièce par pièce, fiche, met en classeur. L'explorateur se mue en homme de cabinet dans une obsession de systématicien des séries. En 1946, une Exposition d'art rustique des Alpes rhodaniennes, au musée d'Ethnographie de Genève, puis à Annecy enfin à Paris, rend le savant fréquentable par les universitaires et la génération de 1968. En recevant la médaille de Chevalier des Arts et des Lettres, il répond : «Us m'ont accusé d'avoir pillé le pays. Et après, ils m'ont décoré parce qu'ils trouvaient que j'avais sauvé le patrimoine. » Cependant le but de cet exposé est de ramener au présent les usages de cette mémoire archivée, dont Bernard Crettaz, en pleine continuité, avait exploité les thèmes lors d'expositions marquantes. Restituer la collection, sans la figer dans un mausolée du fondateur, exige de la remettre en situation, de la définir comme ressource pour l'arc alpin. Et si la reconquête de ces patrimoines, hier comme aujourd'hui, n'avait pas toujours germé comme ça, dans un dépôt bourré de relances ? Les Alpes ont aussi besoin d'autodidactes.