1992
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Hans Robert Jauß, « L'art comme anti-nature, à propos du tournant esthétique après 1789 », Mélanges de l'école française de Rome (documents), ID : 10.3406/mefr.1992.4198
Hans Robert Jauß, L'art comme anti-nature. À propos du tournant esthétique après 1789, p. 61-91. Si l'on se pose la question de quel droit peut-on soutenir qu'au tournant politique de 1789 a suivi une révolution esthétique, on devrait la chercher sur la scène allemande où Friedrich Schlegel annonçait à ce titre le romantisme. Ce tournant esthétique commençait par le projet de l'idéalisme allemand d'ouvrir la voie, après l'échec de la raison politique, à une culture esthétique, censée pouvoir réaliser l'État des hommes libres et égaux. Cet espoir s'avérant inaccessible, l'avant-garde des Romantiques se détourna de la philosophie de l'histoire et chercha le salut dans la raison inconsciente de la nature. Mais l'esthétique de la nature bénigne du romantisme échouait, elle aussi, dans l'expérience d'un retour du refoulé, d'une nature brute, instinctive, hostile. Dès lors, l'esthétique postroman- (v. au verso) tique chercha à extirper la nature même de la production artistique. Le mépris de la nature, dont les origines se trouvent chez Sade, De Maistre, Chateaubriand et Hegel, caractérise une tendance dominante, encore méconnue, au XIXe siècle. Elle trouve son point culminant chez Baudelaire (Rêve parisien), son fondement théorique chez Valéry qui, cependant, annonce finalement la révision de son 'erreur', donc le début d'une revalorisation de la nature qui est encore courante de nos jours.