2005
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Guillaume Lachenal, « Les réseaux post-coloniaux de l'iniquité. Pratiques et mises en scène de la science biomédicale au Cameroun, 1959-2002 », Outre-Mers. Revue d'histoire, ID : 10.3406/outre.2005.4136
Cet article met en perspective historique l'avènement des « réseaux » et des « partenariats » qui organisent les collaborations scientifiques Nord-Sud depuis la fin des années 1990. Ces formes nouvelles d'organisation du travail scientifique, qui revendiquent en Afrique une rupture avec le passé de la recherche coloniale, sont analysées à partir de l'exemple de la scène biomédicale de Yaoundé, la capitale du Cameroun. Dans une ville qui est devenue un « point chaud » de la recherche virologique sur le VIH-Sida, l'article montre d'abord comment les pratiques de recherche « sur projet », organisées autour de quelques figures locales, perpétuent un modèle spectaculaire et radical d'échange inégal : l'extraction d'une matière première scientifique, les prélèvements sanguins camerounais, vers le Nord et ses laboratoires. L'article envisage ensuite plus particulièrement le cas d'une institution majeure de recherche médicale au Cameroun, le Centre Pasteur du Cameroun, elle aussi impliquée dans la recherche sur les virus du Sida. Cette institution, liée à la Coopération française et à l'Institut Pasteur de Paris, se singularise localement par sa forte visibilité et par son appartenance à un réseau organisé, le « Réseau International des Instituts Pasteur et Instituts Associés ». L'article met à jour, à travers l'histoire post-coloniale de l'institution pasteurienne, les originalités et les contradictions d'une telle forme de collaboration internationale, en la comparant aux « projets » mis en place à Yaoundé par les scientifiques locaux. L'article montre alors comment les échanges scientifiques, dans les deux types de configurations, restent structurés par une évidente iniquité pratique et symbolique. Cette iniquité n'est pas sans susciter réponses et contestations, que l'article propose d'identifier à travers les rumeurs qui circulent à propos du Centre Pasteur.