1974
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Marcel Drach, « Le financement des relations économiques Est-Ouest », Revue d'études comparatives Est-Ouest, ID : 10.3406/receo.1974.1209
La croissance soutenue que connaissent les échanges entre les pays socialistes et les pays occidentaux industrialisés depuis une décennie a fait naître un problème de financement. Imputable, pour l'essentiel, à des termes d'échange défavorables aux pays socialistes et à un déficit prolongé de leur balance commerciale avec les pays occidentaux, il s'est traduit par la recherche d'instruments propres à mettre à la disposition des pays de l'Est en quantité grandissante et sous des formes toujours plus variées les fonds requis pour faire face à ces déséquilibres. Parmi ces instruments, les crédits commerciaux — largement tributaires des accords intergouvernementaux — les opérations en capital — effectuées au contraire en dehors de tout cadre officiel sur les marchés internationaux — les sociétés mixtes et la coopération monétaire internationale — solutions récentes et à certains égards hypothétiques — doivent retenir l'attention. L'étude des crédits commerciaux consentis par les pays occidentaux à leurs partenaires socialistes fait apparaître une prédominance marquée des crédits à moyen et à long terme sur les facilités à court terme. Cet usage est symptomatique de la part des pays socialistes d'une forte demande de biens de production, de la structure spécifique de leur balance commerciale (exportation de marchandises à faible intensité-travail, importation de marchandises à forte intensité-travail) et de la rentabilité encore faible des fonds fixes de production. Fréquemment assurés contre les risques économiques et politiques par des organismes publics ou semi- publics, les crédits commerciaux consentis aux pays socialistes impliquent l'usage de techniques dont l'orthodoxie s'affirme avec la confiance des échangistes, le « switch » et le « leasing » n'occupant qu'une place marginale. L'intervention des pouvoirs publics vise à travers la conclusion d'accords intergouvernementaux à réglementer et à soutenir l'octroi de crédits commerciaux aux pays socialistes. La concurrence à laquelle se livrent les pays occidentaux en vue de conquérir les marchés socialistes se reflète principalement, au niveau de ces accords, dans la baisse des taux d'intérêt exigés des pays socialistes et dans l'allongement des durées de crédit qui leur sont accordées. Bien qu'un certain nombre d'initiatives aient été prises en ce sens à l'échelon de la Communauté Economique Européenne et de l'O.C.D.E., aucune harmonisation réelle des politiques occidentales n'a pu être instituée pour limiter les effets d'une telle surenchère. En admettant toutefois qu'une coordination de cet ordre fût mise en place, son efficacité eût été limitée puisque les pays socialistes multiplient depuis quelques années leurs interventions sur les euro-marchés afin de diversifier leurs sources de financement. Pléthorique et peu onéreux (tout au moins jusqu'en avril 1973), les marchés des euro-devises et des euro-émissions offrent en effet aux pays de l'Est des facilités sans contreparties politiques. Cependant, la crainte d'occuper une position débitrice trop marquée à l'égard des pays occidentaux a incité les pays socialistes à poursuivre plus avant encore leur quête de techniques nouvelles de financement. Les sociétés-mixtes, dont le développement est encore négligeable et presque entièrement centré sur les entreprises commerciales, peuvent être considérées comme une solution d'avenir malgré les délicats problèmes de cohabitation qu'elles soulèvent. Il en est de même de la coopération monétaire internationale dont les progrès sont, au demeurant, suspendus, à l'Ouest, à l'édification d'un nouvel ordre monétaire international, à l'Est, aux succès — ou aux échecs — de l'intégration communautaire. En tout état de cause, le financement des relations économiques Est-Ouest a désormais atteint un niveau de maturité qui autorise une normalisation de ses procédures et de ses conditions. L'avantage que les pays socialistes ont conquis récemment du fait de la haute tenue des cours de l'or sur les marchés libres et du triplement du prix du pétrole devraient en accélérer le processus.