1975
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Joseph Fišera, « Autogestion et cogestion (esquisse d'une étude comparative et bibliographique) », Revue d'études comparatives Est-Ouest, ID : 10.3406/receo.1975.1972
L'auteur prend pour référence des résultats de ses études sur les mouvements coopératifs et autogestionnaires sur le terrain en Europe centrale, orientale et en Espagne d'avant-guerre de même que les observations qu'il a pu faire en participant à des stages et des enquêtes sociologiques en Yougoslavie, Bulgarie, Tchécoslovaquie, Pologne, Italie, Allemagne, Autriche, Belgique, Israël et France. Il s'efforce de faire ressortir l'importance de la conscience et de la mémoire collective de ces nombreux groupes de populations qui aspirent à une participation vraie et directe à la gestion de leurs propres affaires, attendent de les diriger si possible seuls accélérant ainsi leur propre intégration sociale et politique. L'inventaire provisoire de ces expériences conduit à bien distinguer les modèles théoriques des cas ayant existé ou se maintenant, survivant sous une forme de cogestion avec l'Etat, socialiste ou libéral. Les réflexions présentées sont guidées par la recherche de nouveaux éclairages pour faciliter la compréhension et l'explication des deux « dilemmes » éternels, voire des postulats : 1. L'autogestion, l'idée des conseils ouvriers, n'a pas été extraite des archives idéologiques par quelques théoriciens des principes de la Commune de Paris ou des régimes politiques modernes, ni transplantée de la Yougoslavie ensoleillée. Elle revit où elle existait et existe : dans la conscience de ceux qui travaillent. Comment expliquer également que, malgré certains déboires, ces mêmes idées d'autogestion, spectres ou épouvantails pour certains, même pour la bureaucratie syndicale ou étatique, reviennent toujours avec plus de force : pendant les périodes de libéralisation ou de grandes tensions sociales, reprenant chaque fois l'idée d'autogestion à leur compte, les salariés en exigent la réalisation et le développement. 2. Quelle série de réponses nous réservent les modèles d'intéressement et d'intégration des salariés dans le contexte développé à l'intérieur des Etats, où le secteur industriel est dominant depuis longtemps : les tendances à la cogestion et à l'autogestion de l'expérience tchécoslovaque d'une part, les modèles proposés et les expériences réformistes tentées en Occident, en Europe de Nord et en Israël, voire un courant puissant sur le plan de la promotion accélérée, sociale et culturelle aux Etats-Unis d'autre part. Ces réalités apparemment irréelles (la conscience, les traditions), les modèles proposés (constructions juridiques ou autres) et les différents cas, malgré tous leurs avantages et aléas, constituent-ils un progrès dans le cheminement de l'utopie et de l'héroïque vers le rationnel ? Ou confirment-ils l'explication, aussi partielle et incomplète qu'elle pourrait le paraître, que l'autogestion ne peut pas exister sans éducation préalable, parallèle, permanente, généralisée et accélérée ?