1987
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Alain Pouliquen, « La modernisation structurelle d'une agriculture privée en économie socialisée : le tournant polonais », Revue d'études comparatives Est-Ouest, ID : 10.3406/receo.1987.1319
Après 40 ans de consolidation et de fonctionnement d'un système économique et social « de type soviétique », en Pologne, l'agriculture « individuelle » reste sa base essentielle d'approvisionnement agro-alimentaire. Pourtant une politique longtemps discriminatoire à son égard, et des offensives cycliques de socialisation agraire, ont notablement retardé sa modernisation et semblaient accréditer jusqu'à présent la thèse de sa profonde incompatibilité structurelle avec ce système, donc de la fatale liquidation ou marginalisation à terme de ce phénomène atypique des économies est-européennes. Par ailleurs le mécanisme ouest-européen (et notamment français) de modernisation agricole structurelle, où l'auto-régulation marchande-monétaire générale a joué le rôle décisif (même s'il était médiatisé par l'intervention d'un important appareil étatico- corporatif) s'est avéré, pour cette raison, inassimilable par la Pologne. L'histoire de cette longue coexistence difficile se prête de plus en plus à une autre lecture possible, à savoir celle d'un apprentissage lent et tâtonnant d'un mode spécifique, et historiquement inédit, de modernisation sélective de l'agriculture privée, tout à fait conforme à la logique « distributive » de l'économie et de la société globales, et d'intégration à cette logique générale. C'est bien le sens du tournant pris par la politique agricole polonaise d'après 80-81, que la dépression économique générale semble avoir durablement débarassée de l'hypothèque paralysante de la « nécessaire » socialisation agraire. Les premiers résultats productifs et économiques de ce tournant en confirment la réalité et la pertinence. Mais en même temps ils semblent montrer à la fois la nécessité de son approfondissement dans le sens d'une véritable mutation structurelle des exploitations concernées, et la grande difficulté de celle-ci dans l'état actuel des rapports entre elles et l'administration agricole.