1997
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Francis Lacoste, « Bouvard et Pécuchet, ou Quatrevingt-treize « en farce » », Romantisme, ID : 10.3406/roman.1997.3186
Flaubert, qui a toujours eu une attitude ambivalente envers Hugo - fascination pour le poète et irritation devant le « grand bénisseur » - se livre dans Bouvard et Pécuchet à une sorte de parodie de Quatrevingt-Treize. Les deux cloportes et les événements de la Terreur auxquels ils s'intéressent apparaissent comme la transposition bouffonne de l'épopée hugolienne. De plus, Flaubert reprend à sa manière des situations ou des thèmes évoqués par le « Crocodile », dont il tourne en dérision la philosophie idéaliste et l'engagement progressiste. Privée de sens, l'Histoire devient une « blague » cruelle et dérisoire, et le roman historique un genre faux et démagogique ; mais cette condamnation vise aussi le genre romanesque lorsqu'il est tenté par la peinture de l'Idéal ou la transfiguration épique. Refusant de mettre l'Art au service de l'Histoire de son idéologie républicaine, Flaubert s'en prend à un homme qu'il vénère pourtant, et hésite entre le pastiche et la charge. La fin ne lève pas l'ambiguïté : indétermination généralisée qui amène à se demander si Flaubert ne s'est pas moqué de tout le monde, y compris de lui-même.