2001
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Martine Lavaud, « « Grotesque XIXe siècle » : le vertige relativiste des exhumations littéraires », Romantisme, ID : 10.3406/roman.2001.1045
La redécouverte des grotesques, ces écrivains «fossilisés» par les condamnations de Boileau, a nourri une large part de la critique romantique du XIXe siècle: Nerval, Philarète Chasles, Saint-Marc Girardin, Nodier, Sainte-Beuve, Gautier et d'autres encore, voulurent rendre à la lumière ce qui fut inhumé, et rechercher une vérité ensevelie sous les strates de jugements accumulés par l'histoire (au sujet de Théophile de Viau, par exemple). Tout porte à croire que cette critique archéologique aperçoit dans les «grotesques» l'expression du vertige relativiste: le décentrement permanent des jugements de valeurs, la méditation sur la contingence de l'histoire, l'assimilation des «poetae minores» aux ratés de 1830... Pour mieux refuser le discours normatif et théorique, le relativisme culturel se définit ainsi sur un mode esthétique et polymorphe, analogique et métaphorique. Pourtant, parce que le pari relativiste de la critique grotesque devient une sorte d'étendard du romantisme opérant sa propre réhabilitation via les «poetae minores», parce qu'il s'avère être la manifestation narcissique d'un rapport angoissé à la postérité, il demeure indissociable de la conscience de son échec.