2007
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Hervé Regnauld et al., « Fragments géographiques », Travaux de l'Institut de Géographie de Reims, ID : 10.3406/tigr.2007.1547
La géographie et les arts plastiques sont notoirement liés : des peintres détournent des cartes sur leur toiles, le Land Art introduit des écarts entre l'espace géographique et le site. Dans ce large faisceau d'entrecroisements un domaine précis est encore peu étudié : il s'agit du travail de terrain, que certains géographes et certains plasticiens partagent. Ce travail prend place au début, il est accompli antérieurement à la réalisation matérielle de l'œuvre (plastique ou scientifique), mais il n'est pas aboli par l'œuvre finie, dans laquelle il subsiste, et dont il construit partiellement le sens. En Octobre 2006, une exposition a été organisée à l'Université de Rennes 2. Des œuvres du Frac (Fonds régional d'Art Contemporain de Bretagne) ont été sélectionnées en fonction de leur capacité à interroger l'importance du «travail de terrain ». Ces pièces (photos, peintures, une sculpture et une vidéo) sont pour partie fondées sur une appréhension technique du terrain (échantillonnage, croquis, nivellement, cartographie) qui est routinière pour les géographes. Mais au final les artistes qui les «mettent en œuvre » peuvent produire des toiles, des sculptures qui contiennent des «erreurs » scientifiques. Cet article s'intéresse à la pertinence du mot «erreur » dans un tel contexte interdisciplinaire. Dans une première partie il explique comment les artistes exposés tentent de parvenir à une «exactitude », en précisant leur focale (N. Childress and S. Ristelhueber, en exerçant leur mémoire (A.M. Filaire), ou en détournant des techniques cartographiques (S. Vonnier, P.A. Gette). Dans une seconde partie l'article décrit comment, malgré l'exactitude du travail préliminaire, des «erreurs » font partie de la performance de l'artiste (E. Kay , A. Ponomarev). Ceci conduit à une interrogation sur le statut de l'erreur dans le processus de création. L'artiste doit-il se confiner au domaine de la vérité scientifique ? Comment le géographe doit-il comprendre une peinture où l'erreur est une fiction ? Autant le dialogue est facile à établir quand artistes et géographes partagent leurs méthodes de terrain, autant, une fois les produits achevés (la toile, l'article...) le dialogue ne fonctionne plus sur les mêmes niveaux. Il n'y a pas partage de compétences, il y a, éventuellement contradiction conceptuelle. Cependant les deux disciplines doivent parvenir à penser ensemble un accord sur la validité du travail produit.