19 décembre 2024
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Julien Salabelle, « La chambre de tante Léonie ou l’imperceptible architecture du soin », Géographie et cultures, ID : 10.4000/12ywn
Si l’on considère, à la suite de Goldstein et Canguilhem, que la santé qualifie non pas un état physiologique, mais les interactions d'un individu à son milieu de vie, relativement à ses capacités physique, psychique et sociale, il apparaît que les malades chroniques déploient, au cours du temps, une expertise fine dans l'organisation de leur lieu de vie, et des relations à leur habitat à la fois efficaces et inventives. Souvent imperceptibles ou mésinterprétés, ces savoirs expérientiels peuvent être abordés par le prisme du témoignage littéraire. Lorsqu’il décrit la chambre de tante Léonie, dans le premier tome de La Recherche du Temps Perdu, Proust dépeint un espace tristement banal, voir austère au premier abord, mais qui se révèle être habité d’une manière extraordinairement riche par les petits gestes du quotidien. Une étude détaillée d’extraits du roman, combinée à des références issues de la théorie de l’architecture, permettent de mettre au jour une organisation minutieuse des espaces et des objets, une gestion savante des horaires et des rythmes de vie, ainsi qu’un investissement original des sens et de l’imagination. L’identification et l’analyse des stratégies spatiales de tante Léonie illustre des manières, pour des personnes fragiles et marginalisés, de faire milieu avec leur habitat.