15 décembre 2008
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Mike Rapport, « « Deux nations malheureusement rivales » : les Français en Grande-Bretagne, les Britanniques en France, et la construction des identités nationales pendant la Révolution française », Annales historiques de la Révolution française, ID : 10.4000/ahrf.1901
Après le déclenchement de la Révolution française, divers groupes, au sein des révolutionnaires français et du mouvement radical britannique, tentèrent de nouer des liens politiques et personnels qui mettraient fin à la vieille rivalité entre les deux peuples, les rapprochant sur la base des droits de l’homme. Parallèlement, une tension existait entre, d’un côté, la dimension universaliste de ces idéaux et, de l’autre, l’idée du citoyen et de la patrie. Lorsque la Révolution entama son tournant radical à partir de 1792, puis avec l’entrée britannique dans la guerre en 1793, il devint de plus en plus difficile pour les sympathisants de la France de soutenir l’appel de cette dernière à la révolution internationale, tel qu’il était formulé dans la déclaration de fraternité du 19 novembre 1792. En France, au même moment, les expatriés britanniques commencèrent à être de plus en plus souvent distingués, non pas pour leur soutien aux principes de la Révolution française, mais en raison du péché originel de leur naissance sur le sol britannique. La suspicion engloba rapidement tous les Britanniques, y compris ceux qui avaient d’impeccables références radicales, comme Thomas Paine et John Hurford Stone. Ce processus parallèle de part et d’autre de la Manche aboutit à un durcissement de la définition du sujet loyal britannique et du bon citoyen français - tout particulièrement en relation avec l’ennemi d’Outre-Manche. Cette reformulation des modèles de loyauté autour de la nation fut aussi marquée par le retour des catholiques britanniques, qui avaient été exilés en France, dans les îles Britanniques. L’hostilité partagée envers la Révolution française en vint donc à dépasser les divisions religieuses entre catholiques et protestants. Ce processus fut facilité par l’arrivée de milliers de prêtres français, dans le cadre de l’émigration. Tandis que l’impact de la Révolution et de la guerre retardèrent la compréhension mutuelle entre Britanniques et Français, ceux qui cherchaient un rapprochement dans les années 1790 avaient, inconsciemment, ouvert la voie d’une entente plus étroite entre les deux États libéraux et constitutionnels qui émergeraient au XIXe siècle.