16 juillet 2020
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Susanne Berthier-Foglar, « Early Tourism in New Mexico: A Primitivist Pastime or a Tool of Integration? », Angles, ID : 10.4000/angles.1268
Entre les dernières années du XIXe siècle et les premières décennies du XXe siècle, la culture du loisir a fait son apparition au Nouveau-Mexique et les voyages guidés sous le label Indian Detours ont été organisés pour les touristes Anglo-Américains (appelés Anglo dans le pays) en quête des cultures exotiques et dites « primitives » au sein même des États-Unis. Les lieux authentiques, les villages (pueblos) historiques et la vie préindustrielle de leurs habitants contribuaient à l’expérience de l’Altérité de la part des touristes. La vie « primitive » n’était pas perçue par les visiteurs comme un élément négatif mais comme un moyen d’échapper à l’industrialisation et à l’urbanisation devenues omniprésentes. Cependant, les souhaits des touristes entraient en conflit avec les politiques fédérales d’assimilation des Indiens. Le Commissaire aux Affaires Indiennes, Charles Burke, émit un grand nombre de circulaires aux Surintendants détaillant des règles strictes pour éviter que les Indiens ne deviennent des attractions foraines. Il déplorait en particulier le fait que les Indiens impliqués dans l’industrie touristique repoussaient leur assimilation en tant que membres productifs de la société américaine. Cet article pose aussi la question de l’intrusion et de l’impact à long terme du « regard touristique » sur les Indiens que l’on pouvait observer dans les gares ou les « villages Indiens » mis en place dans les hôtels et les lieux touristiques. L’architecture du Nouveau-Mexique, et plus particulièrement le style de Santa Fe, ont largement puisé dans le vocabulaire architectural des Pueblos. Dans des circonstances aussi extrêmes d’appropriation coloniale, couplées à l’avènement de l’économie de marché, il est étonnant que les Indiens aient survécu à l’arrivée massive du tourisme culturel. Malgré le marketing des visites guidées ciblant leurs villages et leur histoire aussi bien que leur artisanat et leur art, les Pueblo n’ont jamais accepté de vendre leurs cérémonies. Ils ont mis en place une politique du secret qui forme une barrière protectrice autour de leurs rituels et qui limite l’expérience primitiviste des touristes à ce que les Indiens veulent bien leur montrer. Ils ont accepté le conseil des commerçants pour ce qui est des styles et du type d’objets produits. Toutefois, ils ont graduellement pris en main la gestion du « regard touristique » et ont profité de la fétichisation de tout ce qui est Indien. Dans le contexte d’une forte activité marketing en matière de produits pour le tourisme, il semblerait que ce dernier soit devenu un outil d’intégration, alors même que subsistent des traits culturels auparavant considérés « primitifs », par exemple des cérémonies non-chrétiennes ; au final, le tourisme n’a pas détruit ceux qui avaient été les objets apparemment passifs du « regard touristique ».