27 novembre 2017
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Sophie Bessis, « Le contrôle du corps des femmes à travers l’histoire. Essai de mise en perspective de la question de la santé sexuelle et reproductive des femmes dans le monde arabe », L’Année du Maghreb, ID : 10.4000/anneemaghreb.3151
Le contrôle du corps des femmes est aussi ancien que la domination masculine elle-même, tout entière tournée vers un objectif central, le contrôle de la maternité. Ce contrôle s’exerce selon des modalités particulières dans les différentes civilisations mais a toujours pour but de maîtriser la sexualité féminine de manière à assurer la fonction reproductive au profit du groupe des mâles. Les pratiques coutumières des sociétés les plus diversifiées se sont attachées à codifier les modalités du contrôle. Quant aux religions, en particulier les trois religions monothéistes mais pas seulement, elles ont servi à sacraliser les processus de domination à travers lesquels s’exerce le contrôle patriarcal. Religions et coutumes étroitement mêlées, l’une renforçant les autres, ont ainsi édifié des appareils normatifs de domination. C’est ainsi qu’elles légifèrent toutes sur le corps des femmes, enfermant ce dernier dans un corset d’obligations et d’interdits. La valorisation symbolique de la fonction maternelle et la démonisation de la féminité font partie de cet appareil de contrainte. Ce corset a été contraint de céder (plus ou moins) dans les sociétés sécularisées et en voie de sécularisation où les interdits religieux ont été progressivement déconnectés de la loi positive. Tandis qu’en Europe, les avancées ont été proportionnelles aux processus de sécularisation, les interdits résistent dans le monde arabe vue la lenteur de ces processus et les régressions qui ont pu les affecter. On passera en revue la multiplicité des injonctions religieuses à la procréation et des interdits frappant l’autonomie reproductive et sexuelle des femmes. On s’attardera davantage sur leur permanence en contexte arabo-musulman, pour montrer que la sécularisation des lois et des pratiques sociales est une condition nécessaire au plein exercice des droits sexuels des femmes, même si elle ne suffit pas à assurer à elle seule cette libération.