10 juillet 2020
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Théo Blanc, « Ennahdha et les salafistes : la construction relationnelle de la « modération » », L’Année du Maghreb, ID : 10.4000/anneemaghreb.6411
Parti islamiste de gouvernement, Ennahdha semble s’inscrire parfaitement dans le schéma prédit par la théorie de la modération selon lequel l’inclusion politique produit des acteurs « modérés ». Cet article invite à dépasser la lecture institutionnaliste de la théorie de l’inclusion-modération et la lecture asymétrique de la théorie de la coopération-modération en montrant comment la modération d’Ennahdha s’est négociée dans un double rapport de force entre acteurs séculiers et acteurs islamiques « radicaux » (salafistes). Le propos s’inscrit en continuité avec la théorie de « la modération par l’exclusion » (Cavatorta et Merone, 2013) en montrant que (1) la modération d’Ennahdha a largement précédé l’inclusion, (2) que la dynamique de coopération-modération avec Nidaa Tounès s’est appuyée sur un processus d’exclusion des « radicaux », et également que (3) la théorie de la modération n’est pas applicable à la plateforme sociale des partis. L’argument central est que la modération d’Ennahdha, définie comme l’acceptation d’un système civil et démocratique, n’a consisté ni en un simple ajustement stratégique découlant de l’inclusion, ni en un processus inclusif exerçant une force centripète sur le champ islamique et transformant les « radicaux » en « modérés » comme le postulait la théorie, mais plutôt en un processus centrifuge de mise à distance des éléments « radicaux ».