11 février 2022
Ce document est lié à :
info:eu-repo/semantics/reference/issn/1954-3778
https://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/ , info:eu-repo/semantics/openAccess
Anne-Valérie Dulac, « Silks and Skins », Apparence(s), ID : 10.4000/apparences.3583
Cet article est le produit d’un entretien avec Nina Wetzel au sujet de son travail de conception du décor et des costumes de la mise en scène de La Nuit des rois par Thomas Ostermeier à la Comédie Française. Il analyse la façon dont le redéploiement de la fourrure et des objets et matériaux d’origine animale par Wetzel constitue un geste ironique et réflexif par rapport à l’obsession de la pièce pour les étoffes et le vêtement. Après un court bilan critique consacré aux allusions au textile dans la comédie, l’article se penche sur les propriétés matérielles des tissus d’origine animale tels qu’ils apparaissent dans la pièce, ouvrant à une discussion des qualités et valeurs respectives des soieries et de la peausserie. L’opalescence réfléchissante des taffetas y est opposée à la profondeur haptique des fourrures, commémorant en ceci les inquiétudes sartoriales qui traversent la fin du règne d’Elisabeth Ie, que l’on voit s’exprimer dans les nombreuses lois somptuaires de la période. Le choix de Wetzel d’exhiber la dimension charnelle et animale des étoffes qu’elle travaille méticuleusement donne ainsi corps et substance aux métaphores textiles de la comédie et aux craintes sociales et politiques qui y sont associées. En faisant le choix de l’animal, Wetzel dévoile toute la porosité des limites de l’humain dans La Nuit des rois, offrant dans le même mouvement un puissant commentaire des formes de domination qui traversent la comédie.