4 septembre 2019
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Rosalina Estrada Urroz, « Tabúes y pasiones. Ideas, afectos y prácticas en el cruce del Atlántico », Artelogie, ID : 10.4000/artelogie.3718
Franchir la frontière depuis la mer prend une autre signification; les ports de départ et d'arrivée sont, pour l'attachement et la culture, un paysage à évoquer. Ces hommes et ces femmes qui arrivent de la France au Mexique, peut-être à la ville de Veracruz, portent le poids de leur passé. En traversant l’océan, ils composent les mots de la nostalgie, et ces mots s’animent dans leur correspondance. Thierry de Ménonville part à Oaxaca au XVIIIe siècle avec un but précis : s’approprier de la cochenille pour son élevage à Saint-Domingue ; pendant la traversée, il observe la nature et les habitants, il admire l'environnement, mais les battements de son cœur s'accélèrent à la vue d’une belle femme et à l’approche de son trésor rouge cramoisi. Si l'on se place dans la perspective des sensibilités, comme dit Wickberg, nous passons des représentations à des formes de perception et de sentiment. Nous situons Ménonville dans son temps comme un homme des Lumières du XVIIIe siècle ayant connu, selon Mornet, toutes les formes de la pensée contemporaine. Les livres et les idées voyagent aussi et trouvent leur place d'une façon qui leur est singulière. Parent du Châtelet en est un exemple. Ses raisonnements d’hygiéniste sur la prostitution se trouvent ainsi immergés dans la dispute entre les réglementaristes et les abolitionnistes : quand elle voyage, toute pensée rencontre des mondes habités par des nombreux spectres.