L’identité changeante des Jat de l’Inde du Nord

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16 mars 2022

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Christophe Jaffrelot, « L’identité changeante des Jat de l’Inde du Nord », Éditions de l’École des hautes études en sciences sociales, ID : 10.4000/books.editionsehess.24122


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Cet article vise à montrer que les Jat de l’Inde du Nord fournissent une excellente illustration de la malléabilité des identités collectives. Caste intermédiaire appartenant au varna des Shudra, les Jat ont traditionnellement revendiqué le statut de Kshatriya. Ils ont réaffirmé cette position au xixe siècle sous l’influence de l’Arya Samaj qui s’est efforcé de sanskritiser la plupart des basses castes de la Hindi Belt. Caste de cultivateurs par excellence, les Jat ont cependant peu à peu mis l’accent sur leur identité de paysans (« kisanité »), à nouveau pour partie sous l’impact de l’Arya Samaj qui valorisait l’effort des hommes s’émancipant par le travail, comme en témoigne le discours de Sir Chhotu Ram. Cet idiome commença à devenir dominant après l’indépendance, et plus précisément dans les années 1960 et 1970 sous l’impact de Charan Singh. Ce dernier s’efforça de transcender les identités de caste et de classe dans une idéologie paysanne afin de se constituer une base politique. Il y réussit assez bien mais son registre politique commença à perdre de son attrait dans les années 1980-1990 lorsque les basses castes se mirent à définir leur identité non par leur activité dans les champs mais par leur retard socio-économique lié à leur caste : elles souhaitaient, à la suite du rapport de la Commission Mandal, être classées parmi les Other Backward Classes et obtenir ainsi un quota dans l’Administration. Les politiciens Jat restèrent attachés au répertoire du Kisan jusqu’à la fin des années 1990 mais demandèrent finalement que leur caste soit considérée comme appartenant aux obc. L’État répondit à leur attente au Rajasthan et en Uttar Pradesh. La trajectoire des Jat qui, d’abord soucieux de valoriser leur « kshatriyaisation » ont fini par se dire « arriérés » après s’être présentés comme des paysans indépendants (Kisan), invalide une fois de plus le paradigme primordialiste. Elle montre que les identités politiques peuvent se transformer en fonction de stratégies socio-économiques et politiques.

The Changing Identity of the JatS in North India: Kshatriyas, Kisans, or ‘Backwards’?In this article it is argued that the Jats of North India offer a good illustration of the malleability of collective identity. An intermediary caste belonging to the varna of the Shudras, the Jats have traditionally claimed to be Kshatriyas. They reasserted this stand in the nineteenth century under the influence of the Arya Samaj, which had a strong sans-kritising impact over most of the non-upper caste people of the Hindi heartland. As a cultivating caste, however, the Jats gradually stressed their Kisan (peasant) identity, again partly because of the Arya Samaj’s ideology which promoted industriousness and self-help, as exemplified by the discourse of Sir Chhotu Ram. This idiom began to prevail after Independence, and particularly after the 1960s, under the aegis of Charan Singh. The Chaudhary tried to subsume caste and class identities in peasantism in order to build a new political constituency for himself. He was rather successful but his political repertoire lost some of its appeal in the 1980s and 1990s when the lower castes claimed that their identity was mainly defined not by their work in the fields as Kisans but by their socio-economic backwardness as castes: in the wake of the Mandal Commission Report they wanted to be classified among the Other Backward Classes in order to be given job quotas. Jat politicians stuck to the Kisan repertoire till the late 1990s but, eventually, asked to be recognised too as obcs. The State obliged them in Rajasthan and Uttar Pradesh. The shift of the Jats from ‘kshatriyahood’ to ‘backwardness’ via Kisan identity is an additional refutation of the primordialist argument. It shows that political identities can be transformed according to socio-economic and political strategies.

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