16 mars 2022
https://www.openedition.org/12554 , info:eu-repo/semantics/openAccess
Gilles Tarabout, « Des gags dans le culte. », Éditions de l’École des hautes études en sciences sociales, ID : 10.4000/books.editionsehess.26172
Il existe, dans quelques cultes du Kerala, de courtes farces intégrées au déroulement même du rite. Elles mettent en scène des Puissances dangereuses, les bhūtan, qui apparaissent alors fréquemment comme grotesques. Faut-il, comme certains le voudraient, interpréter de tels faits comme la marque d’une distance prise par rapport à ces Puissances elles-mêmes, en tant que telles ? En proposant plutôt d’y voir une distanciation au seul plan du jeu, un écart entre acteur et personnage, l’étude suggère l’existence d’au moins deux registres bien distincts dans la façon de rendre présente, « d’incarner », une Puissance divine : théâtre et possession. Si l’observation extérieure peut parfois y percevoir une continuité, voire une ambiguïté, les intéressés ne confondent jamais, dans le principe, ces registres. Et un passage éventuel de l’un à l’autre est rituellement signalé. Les cultes qui recourent à des farces apparaissent alors comme établissant des modes pluriels de relation au divin, où les effets de miroir concourent, en fait, à la célébration d’un « enchantement de la Forme ».