29 juin 2017
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Pierre Sineux, « Une nuit à l’Asklépieion dans le Ploutos d’Aristophane : un récit dans le théâtre pour l’étude du rite de l’incubation », Éditions de l’École des hautes études en sciences sociales, ID : 10.4000/books.editionsehess.3423
Le passage du Ploutos d’Aristophane, dans lequel Carion fait à sa maîtresse le récit de la nuit au sanctuaire d’Asklépios où il a assisté à la guérison de Ploutos, est souvent cité pour les pratiques rituelles qui se rapportent à l’incubation qu’il est censé évoquer. Or, l’examen des conditions d’énonciation – et non du seul énoncé – permet en fait d’interroger non seulement la conception que les Anciens se faisaient de cette expérience singulière, « voir la divinité », mais aussi certaines des modalités utilisées pour la « dire ». Esclave glouton et sans scrupules, Carion voit ce qu’il ne devrait pas voir, à savoir l’intervention du dieu auprès des malades: n’ayant accompli aucun cheminement rituel, il occupe une position transgressive, mais tel un spectateur de théâtre, il reste extérieur à l’action qui se déroule. Dans le récit qu’il entreprend alors, on observe comment se superposent des emprunts et des sources de différentes natures (iamata d’Épidaure, Corpus hippocratique, etc.). Carion incarne en réalité une fonction de médiation analogue à celle qu’occupent les rédacteurs des « stèles de guérison » d’Épidaure qui, à partir de l’expérience singulière des rêveurs du sanctuaire, construisent, en définitive, à l’intention du public un discours sur le dieu et ses pouvoirs.