Dossier : Le genre du luxe dans le monde grec ancien

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Dossier : Dans les cités grecques, le luxe est qualifié de barbare et féminin. L’historiographie s’est accommodée de ce topos pour forger l’image de corps civiques sobres et égalitaires. Le genre du luxe remet ces idées en cause. Varia : Homère, serment de Zeus et recettes magiques. Polysensorialité des sanctuaires grecs. La ceinture de Gabies. Narratologie pindarique. Solon à Salamine. Leucothée à Élée. Dettes et balances en Méditerranée. Ramon Pane et Lucien. Entretien avec François Lissarrague. Considéré généralement comme un marqueur ethnique, un signe de la richesse du souverain et de l’élite achéménides, caractéristique d’un régime politique plein d’hubris (démesure), le luxe ne disparaît pourtant pas des cités après les guerres médiques ; il demeure un moyen de reconnaissance sociale. Le dossier intitulé Le genre du luxe dans le monde grec ancien offre l’occasion de s’interroger sur le luxe, compris comme pratique et mode de distinction, en premier lieu élitaire, sous l’angle du genre. En effet, si deux de ses personnifications, Habrosunê comme Truphê, ont les traits et le corps d’une femme que caractérisent la délicatesse, le faste, l’opulence, la prospérité mais également la mollesse, la lascivité, la séduction et la féminité, le luxe n’était pas, loin de là, l’apanage des Barbares et des femmes. Mais le mettre au féminin était sans doute un moyen, pour les Anciens, de le stigmatiser, au sein de cités fondées sur l’égalité civique. Et si les Modernes ont repris ce topos, c’est qu’il permet de concéder l’existence du luxe sans entamer l’image, bien ancrée dans l’historiographie, d’un corps civique sobre et égalitaire. Les contributions, sans embrasser toutes les pistes possibles, portent sur les produits et objets de luxe (étoffes, vêtements, produits exotiques, cristal de roche et parfum) ; elles s’attachent également aux contextes et aux espaces de son déploiement ou étalage (religieux, politique ou encore domestique et familial ; du côté des Grecs comme chez les Barbares), ainsi qu’aux différents discours consacrés au luxe, comme mode de consommation et mode de vie (somptuosité vestimentaire, opulence des banquets, séduction outrancière, sexualité débridée, quête excessive des plaisirs, etc.), aux pratiques fastueuses comme marqueurs identitaires et modes de domination.

Dossier: In the Greek cities, when it is stigmatized, luxury is often characterized as barbaric and feminine, and historiography did accept this topos to build the image of a sober and egalitarian civic body. This issue invites to have a new perspective on these questions through an examination of the gender of luxury. Varia: Homer, the oath of Zeus and magic recipes. The multi-sensoriality of Greek sanctuaries. The Gabinian Cincture. Pindaric narratology. Solon at Salamis. Leucothea at Elea. Debts and scales in the Mediterranean. Ramon Pane and Lucian. Interview with François Lissarrague. Often considered as a mark of ethnicity, a sign of the wealth of the Achaemenid king and elite, and a feature of a political regime characterized by its hubris (immoderation), luxury yet does not disappear from the cities after the Persian Wars but remains a way of social recognition. This issue, titled The Gender of Luxury in the Ancient Greek World, offers an occasion to discuss luxury, understood as a practice and mode of distinction, primarily elitist, through the lens of gender. If indeed two personifications of luxury, Habrosyne and Tryphe, are depicted with the traits and body of a woman – that is with delicacy, pomp, opulence, prosperity but also limpness, lasciviousness, seduction, and femininity – luxury was not, and by far, reserved to Barbarians and women. However, to put luxury in the feminine was probably a way for Ancients to stigmatize it, in cities founded on civic equality. And if Moderns did take in this topos, it is because it allows for a recognition of the existence of luxury without spoiling the image, well attested in historiography, of a sober and egalitarian civic body. The contributions, without exploring all possible avenues, address the luxury products and objects (textiles, clothing, exotic products, rock crystal and perfume) ; they also consider the contexts and spaces where they are deployed or displayed (religious, political, or domestic and familial ; for the Greeks as well as the Barbarians); the diverse discourses devoted to luxury, as consumption pattern and way of life (sumptuous clothing, opulent banquets, outrageous seduction, unbridled sexuality, excessive pursuit of pleasures, etc.); the fastuous practices as identity markers and modes of domination.

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