Chapitre 3. Interprétation

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23 août 2022

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Van Vliet‑Lanoë Brigitte et al., « Chapitre 3. Interprétation », Éditions de la Maison des sciences de l’homme, ID : 10.4000/books.editionsmsh.37603


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En Europe occidentale, 5 gisements archéologiques sont caractérisés par la présence d’industries moustériennes laminaires. A partir des données pédo‑stratigraphiques et des datations par thermoluminescence, deux périodes d’occupation peuvent être reconnues : l’une à la fin de l’Eémien, dans des conditions boréales ; l’autre à la fin de l’étage 5c (Brorup), dans des conditions un peu plus froides. Deux gisements (Port‑Racine et le Rozel) sont situés dans des conditions très exposées au bord de la Manche. Ils ont donc été probablement occupés durant l’été. Les deux gisements « continentaux » (Riencourt‑lès‑Bapaume et Seclin) sont situés dans des vallées humides, ce qui correspond sans doute à une occupation hivernale. Leur position géographique permet de supposer que les populations moustériennes possédant ces industries suivaient des migrations saisonnières, en liaison avec la chasse (bovidés, équidés, cervidés).Les niveaux archéologiques, dispersés dans toute la séquence stratigraphique de la première partie du Dernier Glaciaire, ont livré un matériel lithique abondant. Il a pu être attribué à plusieurs types d’industries. Il s’agit d’assemblages à faciès laminaire (CA et C), de Moustérien de type Ferrassie (niveaux C et A, niveau II du chantier Sud), de Moustérien de tradition acheuléenne de type A (niveau C), de Charentien à influence micoquienne (B1 et C), c’est‑à‑dire d’industries de la phase récente du Paléolithique moyen, déjà présentes dans d’autres gisements du nord de la France mais découvertes pour la première fois en un même endroit. Avec la présence d’artefacts que l’on peut rattacher à différentes industries en raison de la fréquence relative de certains types d’outils, de l’existence de pièces (bifaces) que l’on considère généralement comme caractéristiques de traditions culturelles (MTA, Micoquien) et de méthodes de débitage particulières, le matériel du niveau C illustre bien la complexité de la variabilité du Paléolithique moyen. Cette variabilité est le fait de plusieurs facteurs dont nous ignorons les influences respectives.L’ensemble lithique du niveau CA, contenu dans un sol humifère dont la mise en place a été attribuée au stade 5c, montre l’association de vestiges issus d’au moins deux chaînes opératoires distinctes, utilisées simultanément : une chaîne opératoire de production d’éclats Levallois et une de fabrication de lames, dont les modalités s’apparentent à celles rencontrées au Paléolithique supérieur. La composition typologique de l’outillage et sa morphologie allongée affirment le caractère original de cette industrie qui appartient au complexe des industries à lames de la phase récente du Paléolithique moyen. On peut cependant se demander si cet assemblage est homogène. Toutefois, les résultats de l’étude tracéologique menée par S. Beyries sur un premier échantillonnage de 178 pièces semble montrer qu’il existe une relation entre les deux modes de débitage et des fonctions spécifiques (travail de la peau et du bois avec des outils de type paléolithique moyen, activités de boucherie avec des outils de type paléolithique supérieur). Ces résultats, qui diffèrent totalement de ce que l’on observe dans les assemblages moustériens, confirmeraient donc l’homogénéité de l’industrie.Cette dernière s’intègre dans un ensemble de découvertes, remontant au 1er épisode tempéré du début du Dernier Glaciaire, effectuées depuis la partie orientale du Massif armoricain (Cotentin) à la moyenne vallée du Rhin. Une tendance au débitage laminaire peut, d’ailleurs, être observée dans plusieurs industries du Pléistocène moyen récent de la France septentrionale. Le phénomène des industries à débitage laminaire présentes dans le nord‑ouest de l’Europe n’est pas sans rappeler la situation du Proche‑Orient où des industries à lames (Tabun D, Hummalien) existent entre l’Acheuléo‑Yabroudien et un Moustérien de faciès levalloisien. Une forte composante laminaire apparaît également dans certains assemblages d’Ukraine.Le matériel de la série B1 a confirmé l’extension occidentale du Micoquien (ou d’industries présentant des affinités avec les faciès culturels du Micoquien d’Europe centrale), comme le montre la présence de quelques pièces foliacées bifaciales (Faustkeilblätter) et d’autres s’apparentant à des prondniks. Des comparaisons sont effectuées avec d’autres industries de l’Europe du Nord‑Ouest qui ont également été classées dans le technocomplexe Micoquien, au sens de G. Bosinski.Les nouvelles données apportées par le gisement de Riencourt‑lès‑Bapaume attestent l’existence, au Paléolithique moyen récent, de relations entre la façade atlantique de l’Europe et l’Europe centrale, lors des phases d’amélioration climatique dans un paysage de prairie arborée favorable au développement de la grande faune.

In Western Europe, 5 archaeological sites are characterized by the presence of laminar Mousterian industries. Based on soil stratigraphy and on TL dating, it seems that two periods of occupation can be defined for all sites, one at the end of the Eemian during boreal conditions and another in the last part of stage 5c (Brorup) in somewhat colder conditions. Two sites (Port‑Racine and Le Rozel) are located in very exposed conditions along the shore of the Channel. It is presumed, therefore, that they were only occupied during the summer. The two main « continental sites » (Riencourt‑lès‑Bapaume and Seclin) are located in humid shallow valleys and were probably occupied during the winter. From the geographical position of the different sites, it is presumed that the Mousterian population associated with these industries migrated seasonally and primarily hunted bovidae, horses and deer.The archaeological levels, dispersed in the entire stratigraphic sequence of the first part of the last glacial, have yielded an abundance of lithic artifacts. These artifacts can be assigned to many types of industries including blade assemblages (Levels CA and C), Ferrassie Mousterian assemblages (Levels C and A, Level II of the Chantier Sud), a Mousterian of Acheulian Tradition Type A assemblage (Level C) and a Charentian Mousterian assemblage with Micoquian influences (levels B1 and C). In other words, they could be assigned to industries of the late Middle Paleolithic already known from other sites in the north of France but never before discovered together in the same location. These assemblages, particularly the Level C material, illustrate the complexity of Middle Paleolithic.The lithic assemblage of Level CA demonstrates the association of at least two distinct lithic reduction sequences which were simultaneously utilized : one for the production of Levallois flakes and another for the production of blades like those known from the Upper Paleolithic. The typological composition of the tools and their elongated morphology affirm the singular character of this industry which appears to be part of the late Middle Paleolithic complex of blade industries.The material from Level B1 has confirmed the western extension of the Micoquian (or some industries presenting affinities with the cultural facies of the Micoquian of central Europe).The new data given by the site of Riencourt‑lès‑Bapaume attest to the existence, in the late Middle Paleolithic, of relations between the Atlantic coast of Europe and central Europe at a time of climatic amelioration in an arboreal prairie environment favorable for the development of large fauna.

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