26 septembre 2022
https://www.openedition.org/12554 , info:eu-repo/semantics/openAccess
Paule Coudret et al., « Chapitre 1. Les sites de fond de vallée », Éditions de la Maison des sciences de l’homme, ID : 10.4000/books.editionsmsh.39625
Les Magdaléniens ont intensément fréquenté le site d’Étiolles. La concentration de plusieurs niveaux d’occupation (actuellement sur 1 300 m2) permet de développer une approche de type ethnologique : comparaison des choix topographiques, analyse de l’organisation spatiale, identification des activités domestiques, études fonctionnelles sur les foyers, etc. L’exploitation de rognons de silex d’une exceptionnelle qualité (notamment par leurs dimensions est à l’origine d’une conception techno‑économique particulièrement rigide qui facilite la production des grandes lames‑supports. La récurrence de certains comportements (travaux réalisés près des foyers, nettoyages de l’espace intérieur, large utilisation de l’espace extérieur pour diverses activités) révèle des habitudes de groupes. Les relations sociales sont perceptibles à travers la circulation des produits lithiques entre les installations contemporaines et un partage de certaines matières premières. La recherche s’oriente vers l’hypothèse de passages des Magdaléniens lors de circuits saisonniers nécessaires à leur économie de prédateurs et à leur vie sociale. Le gisement de Marsangy est un habitat de plein air magdalénien, situé sur la rive gauche de l’Yonne. Les datations absolues (14C et thermoluminescence), comme les données de l’environnement, permettent de le dater de 12 000 BP, à la transition Dryas II/Alleröd. Dans le secteur central (étudié ici) l’espace s’organise autour de 4 foyers, constitués d’un groupement lâche de blocs de grès et de quartzite. Les activités liées au silex sont les plus importantes, la matière première se rencontrant en abondance dans le voisinage. L’une des structures, N19, peut être interprétée comme un atelier spécialisé dans le débitage, les autres ensembles pouvant représenter des unités d’habitation consacrées au repos. La chasse constituait une activité complémentaire. Elle est attestée par la présence de vestiges animaux et l’abandon d’objets (pointes à dos et à cran) considérés généralement comme des armatures de trait. La connaissance précise de la topographie du substrat des limons et celle du niveau IV20 permet d’examiner, sur près de 4 000 m2, quels ont été les choix d’implantation des chasseurs magdaléniens. Il semble que les premiers occupants se soient installés préférentiellement dans les zones basses du site ; les derniers ont occupé toutes les situations ; zones hautes, mi‑pentes, zones basses, fonds. Une fidélité certaine aux mêmes emplacements manifeste probablement la permanence de la composition du groupe. La présence de onze foyers magdaléniens fonctionnant simultanément sur le même sol permet actuellement d’évaluer à un minimum de plusieurs dizaines de personnes l’importance du groupe venant visiter régulièrement Pincevent, pendant un séjour de quelques semaines, et ce au moins à une quinzaine de reprises. L’organisation spatiale des unités domestiques s’établit suivant le schéma mis en place par A. Leroi‑Gourhan : foyer entouré d’une zone d’activité puis, d’un côté, espace réservé à l’habitation, de l’autre, zone d’évacuation. Les Magdaléniens arrivaient avec un outillage minimum et leurs éléments de parure. Les ressources locales fournissaient l’essentiel des matières premières, blocs de silex et de pierre provenant du lit de la rivière. L’exploitation du silex se faisait sur place et les meilleurs produits étaient emportés pour le campement suivant. L’exploitation des végétaux comme celles des ressources de la rivière reste très hypothétique. Le Renne, dont toutes les parties étaient utilisées ou consommées, était le principal gibier recherché, avec occasionnellement du Cheval et du Lièvre. Rapportées au camp, les bêtes étaient en partie partagées entre les unités domestiques mais, bien que difficile à estimer, la durée d’occupation pose le problème de l’éventuel stockage d’une partie de la viande. Les caractéristiques exceptionnelles des dépôts de Pincevent et le nombre de cycles de dépôts conduisent provisoirement à n’accorder qu’une durée d’une cinquantaine à une centaine d’années à l’accumulation des limons magdaléniens. A l’issue de ces dépôts, les modifications climatiques de l’Alleröd, qui se manifestent par une érosion et un remblaiement importants, sont contemporaines d’une transformation culturelle qui ouvre la voie au Mésolithique. Le site du Magdalénien final du Buisson Campin à Verberie a livré des sols d’occupation en trois loci différents inclus dans des limons de débordement. Le plus étendu, comprend quatre sols successifs dont le plus récent est le mieux connu. Il s’organise autour de deux foyers. Il s’agit comme pour les sols plus anciens d’un campement de chasse au Renne en relation avec la migration d’automne. Les activités qui s’y sont déroulées ont essentiellement trait au dépeçage des rennes et au traitement des matières premières animales ainsi qu’au débitage de nombreux rognons de silex pour fabriquer les outils nécessaires. La présence d’outils en silex exogènes, l’absence de quelques séries de bonnes lames indique que ces campements s’inscrivaient dans un cycle de déplacement annuel des chasseurs magdaléniens.